Par Rachel RUIMY et Alexandre LOBRY
Dès le lancement de votre site internet, il est impératif de publier vos mentions légales, qu’il s’agisse d’un site e-commerce, d’une plateforme ou d’un site vitrine.
L’une des informations obligatoires de vos mentions légales est le nom du directeur de la publication. [1]
Revenons sur un cas concret à travers l’arrêt rendu le 22 janvier 2019 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation[2].1. Contexte
Le 19 avril 2016, plusieurs associations luttant contre le racisme et l’antisémitisme ont alerté le Procureur de la République de Paris concernant les mentions légales du site de l’association Egalité & Réconciliation.
En effet, le directeur de la publication et le directeur adjoint identifiés dans les mentions légales étaient deux personnes incarcérées, ayant respectivement été condamnées à la réclusion criminelle à perpétuité et à trente ans de réclusion criminelle.
Ainsi, leur situation ne leur permettait pas d’assurer la fonction de Directeur de la publication, ni d’en assumer la responsabilité.
Dans ce contexte, le Président de l’association Egalité & Réconciliation a été condamné le 14 mars 2017 par la 17ème chambre du TGI de Paris à une peine d’emprisonnement de 3 mois avec sursis et à une amende de 5.000 euros pour non mise à disposition du public d’information identifiant l’éditeur d’un service de communication au public en ligne. Dans un arrêt du 18 janvier 2018, la Cour d’appel de Paris a confirmé ce jugement.
Le Président de l’association Egalité & Réconciliation a formé un pourvoi contre cette décision. Dans son arrêt du 22 janvier 2019, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé qu’ « aux termes de l’article 93-2 de la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, le directeur de la publication d’un service de communication au public en ligne fourni par une personne morale est, de droit, le représentant légal ou, dans le cas d’une association, statutaire de celle-ci, en dépit de toute indication contraire figurant sur le site interne prétendant satisfaire à l’obligation de mettre à disposition du public dans un standard ouvert l’identité du directeur de la publication instituée par l’article 6 III. de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique ».
Cet arrêt s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence établie. A titre d’exemple, dans un arrêt du 11 juillet 2014, le TGI de Paris avait déjà condamné les dirigeants d’une société à une amende de 6.000 euros pour avoir omis d’indiquer dans les mentions légales de leur site internet les données d’identification du directeur de la publication, de l’éditeur et de l’hébergeur.[3]
2. Comment choisir son directeur de la publication ?
L’article 93-2 de la loi du 29 juillet 1982, sur la communication audiovisuelle[4] indique que « tout service de communication au public par voie électronique est tenu d'avoir un directeur de la publication ».
Le directeur de la publication doit être majeur[5], avoir la jouissance de ses droits civils et n’être privé de ses droits civiques par aucune condamnation judiciaire.
Les deux derniers alinéas de ce même article précisent que :
- Lorsque le service est fourni par une personne morale, le directeur de la publication est le président du directoire ou du conseil d'administration, le gérant ou le représentant légal, suivant la forme de la personne morale ;
- Lorsque le service est fourni par une personne physique, le directeur de la publication est cette personne physique.
3. Quelle est la responsabilité du directeur de la publication ?
La nécessité d’identifier le directeur de la publication d’un service de communication au public en ligne s’explique par le fait que ce dernier est responsable des infractions dites de presse[6] telles que la diffamation, l’injure, la provocation à divers crimes et délits suivis ou non d’effets ou les délits d’opinion tels que la diffusion de fausses nouvelles. A ce titre, la loi du 22 décembre 2018 relative à la lutte contre la manipulation de l'information a institué un référé « anti Fake News ». Ce nouvel outil pourrait bouleverser la manière d’appréhender l’information par le directeur de la publication.
Par ailleurs, en cas d’exercice du droit de réponse, le demandeur devra présenter sa demande au directeur de la publication du site.
Ainsi, dans un jugement du 12 novembre 2018, le TGI de Pau a condamné le titulaire d’un compte Facebook coupable d’injure publique au paiement d’une amende de 1.000 euros, en le considérant comme étant le directeur de la publication au sens de la loi du 29 juillet 1982.
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En sus de l’identification du directeur de la publication, vos mentions légales doivent également impérativement mentionner certaines informations précises relatives d’une part à la société qui édite votre site internet et d’autre part à votre hébergeur.
A défaut, vous vous exposez à une peine d’un an d’emprisonnement et à une amende de 75.000 euros pour une personne physique et de 375.000 euros pour une personne morale.
Vous souhaitez savoir si votre site internet est en conformité avec ces obligations ? Le Cabinet HAAS Avocats est à votre disposition pour vous accompagner sur les aspects e-commerce de votre activité. Contactez nous ici.
[1] Article 6 III 1. c) de la Loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique (LCEN) https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do?idArticle=JORFARTI000002457442&cidTexte=JORFTEXT000000801164
[2] Crim 22 janvier 2019, 22 janvier 2019, n°18-81.779, Inédit (https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?&idTexte=JURITEXT000038091419)
[3] https://www.legalis.net/jurisprudences/tribunal-de-grande-instance-de-paris-17e-chambre-correctionnelle-jugement-du-11-juillet-2014/
[4] Modifié par la LCEN du 21 juin 2004 et par la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté du 27 janvier 2017
[5] La loi du 27 janvier 2017 a ajouté la possibilité pour un mineur âgé de 16 ans révolus d’être directeur de la publication réalisée bénévolement.
[6] Chapitre IV de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse