Maisons du Monde accuse Auchan de copier ses designs : la justice tranche

Maisons du Monde accuse Auchan de copier ses designs : la justice tranche
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Par Haas Avocats

En 2013, la société Auchan a mis en vente des tasses et des bols ornés d'images « vintage » commandés auprès de la société Kitchen Accessories Tables et Surprises (KATS).

 

Estimant que ces objets reproduisaient le décor d'un tableau créé en 2010 par son bureau d'étude de style, la société Maisons du Monde France a introduit une action en justice contre Auchan et KATS, afin d’obtenir, sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme, des dommages et intérêts.

L’arrêt rendu par la Cour de cassation est l’occasion de faire le point sur les prérequis probatoires permettant de voir de telles demandes prospérer sur ce fondement.

À partir de quel moment le parasitisme économique est-il reconnu par les tribunaux ?

Le parasitisme économique est une forme de déloyauté, constitutive d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil, qui consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer indûment profit de ses efforts, de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis[1].

Il appartient à celui qui se prétend victime d'actes de parasitisme d'identifier la valeur économique individualisée qu'il invoque[2], ainsi que la volonté d'un tiers de se placer dans son sillage[3].

La jurisprudence a déjà pu rappeler que :

  • le savoir-faire et les efforts humains et financiers propres à caractériser une valeur économique identifiée et individualisée ne pouvaient se déduire de la seule longévité et du succès de la commercialisation du produit[4];

  • les idées étant de libre parcours, le seul fait de reprendre, en le déclinant, un concept mis en œuvre par un concurrent ne constituait pas, en soi, un acte de parasitisme[5]

Pour qu’un acte de parasitisme soit caractérisé, il est donc nécessaire de démontrer l’existence d’une valeur économique distincte et appropriable, résultant des investissements de la victime.

La preuve des investissements réalisés

Dans le cadre de l’affaire opposant les sociétés Auchan et KATS à la société Maisons du Monde :

  • Maisons du Monde soutenait que les sociétés Auchan et KATS avaient tiré indûment profit des efforts de conception et des investissements consacrés à la création de la toile « Pub 50's » et qu’à ce titre, le parasitisme économique était caractérisé.
  • En défense, les sociétés Auchan et KATS arguaient du fait que les produits litigieux ne constituaient pas une copie servile de la toile « Pub 50's » commercialisée par Maisons du Monde et que les décors des tasses et bols avaient été conçus indépendamment, à partir d'images disponibles librement sur Internet.

Par un arrêt en date du 26 juin 2024, la Cour de cassation relève :

  • L’absence de copie servile : les décors des tasses et bols ne sont pas des copies serviles des clichés utilisés dans la toile « Pub 50's » ;
  • L’absence de caractère emblématique de la collection : la Cour relève que la toile « Pub 50's » a été commercialisée sur une période limitée et n'a jamais été mise en avant comme étant emblématique de la collection « vintage » de Maisons du Monde. De plus, Maisons du Monde exploitait simultanément d'autres collections ;
  • La combinaison banale d’images préexistantes : la Cour estime que la combinaison d'images dans la toile « Pub 50's » ne présente pas une originalité suffisante pour constituer une valeur économique individualisée. De plus, les images utilisées étaient disponibles en libre accès sur Internet, de sorte que la société Maisons du Monde ne détenait aucun droit de propriété intellectuelle sur ces clichés.

Au regard de ces éléments, la Cour de cassation considère que la société Maisons du Monde ne justifiait pas d’une « valeur économique identifiée et individualisée » en créant et commercialisant la toile « Pub 50's ». Elle déboute donc la société Maisons du Monde France de ses demandes sur le fondement du parasitisme.

Le détournement des investissements et du savoir-faire d’une entreprise est un acte qui peut avoir des conséquences économiques préjudiciables pour une entreprise.

La documentation de ces investissements et de ce savoir-faire est souvent le parent pauvre des entreprises, alors que cette démarche est essentielle à la préservation de son avantage compétitif.

Il est essentiel de mettre en place un process interne permettant de disposer de l’ensemble des documents et pièces pour bloquer rapidement et efficacement toute atteinte d’un concurrent (bible de savoir-faire, documentation des investissements humains et financiers déployés pour le développement d’un produit, cahier de tendances, benchmark de la concurrence, frais de recherche et développement, etc..).

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[1] Com., 16 février 2022, n° 20-13.542 ; Com., 10 juillet 2018, n° 16-23.694

[2] Com., 26 juin 2024, n° 23-13.535 ; Com., 20 septembre 2016, n° 14-25.131

[3] Com., 3 juillet 2001, n° 98-23.236

[4] Com., 5 juillet 2016, n° 14-10.108

[5] 1re Civ., 22 juin 2017, n° 14-20.310

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Auteur Haas Avocats

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