IA vs Droit d’auteur : la justice américaine dit non au « Fair use »

IA vs Droit d’auteur : la justice américaine dit non au « Fair use »
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Par Haas Avocats

Avec l'essor de l'intelligence artificielle générative, le droit d'auteur est confronté à des défis sans précédent. En février de cette année, une décision judiciaire majeure a renforcé la protection de ce droit. 

Un tribunal aux  États-Unis a rendu un jugement préliminaire condamnant une start-up pour avoir utilisé illicitement des textes appartenant au conglomérat de médias américain Thomson Reuters, détenteur de l’agence de presse Reuters et de plusieurs filiales d’information juridique et financière. 

La condamnation a rejeté l'argument d'usage loyal « fair use » avancé par la start-up Ross Intelligence, qui avait créé un modèle d'IA juridique servant d'assistant aux avocats. 

L'usage loyal « fair use » est souvent invoqué comme défense par les fournisseurs d'IA dans les litiges concernant les atteintes au droit d'auteur.  

Qu’est-ce que le « fair use » ?

Le concept de « fair use » est une doctrine juridique spécifique au droit américain des droits d’auteur. Il permet l’utilisation de matériel protégé par le droit d’auteur sans l’autorisation préalable du titulaire des droits, sous quatre conditions, à savoir : 

  1. le but et le caractère de l'utilisation, y compris si cette utilisation est de nature commerciale ou si elle est destinée à des fins éducatives sans but lucratif ; 
  2. la nature de l'œuvre protégée par le droit d'auteur ; 
  3. la quantité de l'œuvre utilisée et son importance par rapport à l'ensemble de l'œuvre ;  
  4. la façon dont l'utilisation a affecté la valeur ou le marché potentiel de l'œuvre protégée par le droit d'auteur. 

Sur la base du dernier critère, la décision américaine a souligné que Ross Intelligence poursuivait un objectif commercial et avait l’intention de concurrencer l’autre partie en développant un produit de substitution sur le marché. 

Le « fair use » et le droit d’auteur en France 

En droit français, bien que le concept de « fair use » n’existe pas en tant que tel, certaines exceptions au droit d’auteur peuvent être comparées à cette doctrine. Il convient toutefois de noter que la liste des exceptions françaises est plus exhaustive et ne présente pas une correspondance exacte avec le droit américain. 

Ces exceptions sont énumérées à l’article L. 122-5 du CPI et comprennent notamment : 

  • Les représentations dans le cadre de l’actualité : cette utilisation doit être justifiée par le caractère informatif de la reproduction ou de la représentation ; 
  • Les analyses et courtes citations : qui soient justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, sous réserve de mentionner clairement le nom de l’auteur et la source ; 
  • Les reproductions à des fins de copie privée ; 
  • La parodie, le pastiche et la caricature ; 
  • Les reproductions à des fins pédagogiques : réalisées à des fins exclusives d’illustration dans le cadre de l’enseignement et de la recherche, sous certaines conditions. 

Une autre exception prévue, dite « TDM » (Text and Data Mining), autorise la fouille de textes et de données. Cette exception est bien analysée dans cet article.  

Que prévoit l'IA Act ? 

L’IA Act ne traite pas en profondeur des questions de droit d’auteur, mais il insiste sur la nécessité de respecter les droits fondamentaux, y compris les droits de propriété intellectuelle. Les développeurs de systèmes d’IA doivent s’assurer que l’utilisation de contenus protégés est conforme aux lois sur le droit d’auteur. 

Toutefois, l'IA Act prévoit certaines dispositions qui peuvent être utilisées pour vérifier les données d'entraînement en ce qui concerne le respect du droit d'auteur. Par exemple, en termes d'obligation, les fournisseurs de modèles d'IA à usage général doivent mettre à la disposition du public un résumé du contenu utilisé pour l'entraînement 

En outre, l’AI Act traite sur la nécessité de prévenir les préjudices économiques et sociaux potentiels causés par les systèmes d’IA. En l’espèce, le service juridique fourni par Ross Intelligence aux États-Unis pourrait, s’il était déployé en Europe, être qualifié de « système à haut risque »vii,  entraînant ainsi des obligations renforcées en matière de gestion des risques, de documentation et de conformité. 

 

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