Par Gérard Haas, Charlotte Paillet et Antoine Kraska-Delsol
Les plateformes en ligne permettant de poster des commentaires ou des messages privés sont fréquemment utilisées pour tenir des propos inappropriés à l’égard des personnes. On parle ici de harcèlement sexuel en ligne.
Par exemple, des utilisatrices de la plateforme « Vinted », spécialisée dans la revente de vêtements entre particuliers, ont lancé l’alerte contre les messages privés déplacés qu’elles ont pu recevoir en réponse aux photos de leurs vêtements, sur lesquelles elles figurent parfois. Certaines photos et certains profils sont même partagés sur des communautés et forums tiers, comme le réseau social Reddit.
Toute personne ainsi ciblée dispose de moyens d’action contre le harcèlement sexuel en ligne, mais quels sont-ils ?
Il s’agit bien évidemment du premier réflexe à adopter dans ce genre de situations. Il est de la responsabilité des entreprises fournissant de tels services en ligne soit d’opérer une modération efficace sur les messages et leurs utilisateurs soit de retirer promptement les contenus manifestement illicites qui leur sont signalés.
À défaut d’action rapide de leur part lorsque de tels faits sont avérés et que le contenu est manifestement illicite, les plateformes risquent de voir leur propre responsabilité engagée sur le fondement de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN). Elles ont donc tout intérêt à rester vigilantes et réactives afin de ne pas laisser de tels comportements prospérer.
Elles auront ainsi à supprimer tout contenu inapproprié, mais pourront également décider de suspendre les utilisateurs ne respectant pas les conditions générales de son site[1].
Lorsque les images téléchargées par des utilisateurs de plateformes sont « volées » par des tiers qui les mettent à nouveau en ligne sur d’autres sites internet, il peut être envisagé d’en demander le retrait.
En effet, l’image d’une personne constitue une donnée personnelle au sens du Règlement général sur la protection des données (RGPD)[2], ce qui permet ainsi d’actionner les moyens mis en œuvre par cette réglementation.
Le RGPD prévoit notamment un droit à l’effacement de ses données en son article 17, qui pourra servir de fondement à la demande formulée auprès de la plateforme tierce.
Les messages pervers n’ont pas à rester impunis et il est tout à fait envisageable de déposer une plainte auprès des autorités. En effet, pseudonymat ne rime pas avec impunité : toute personne sur internet peut être in fine identifiée et poursuivie, peu important qu’elle ait dévoilé son identité ou non.
En particulier, l’article 222-32 du Code pénal réprime le harcèlement sexuel par deux ans d’emprisonnement et 30.000€ d’amende. Des messages déplacés peuvent rentrer dans son champ d’application, qui vise spécifiquement « le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ».
En outre, la LCEN récemment modifiée en 2021 introduit en son article 6 I. 8 une nouvelle procédure accélérée au fond[3], permettant aux tribunaux de prononcer « toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne ».
Les victimes de harcèlement en ligne disposent donc d’un panel d’actions pour pouvoir assurer la défense de leurs droits.
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[1] Article 6 LCEN modifiée par notamment par la Loi n°2021-1109 du 24 août 2021
[2] Voir aussi la Loi n°2018-493 relative à la protection des données personnelles du 20 juin 2018 adaptant la Loi « Informatique et Libertés » n°78-17 du 6 janvier 1978
[3] Loi n°2021-1109 du 24 août 2021