Projet de loi pour sécuriser et réguler l’espace numérique : quelles nouveautés ?

Projet de loi pour sécuriser et réguler l’espace numérique : quelles nouveautés ?
⏱ Lecture 3 min

Par Stéphane Astier

Le 10 mai 2023, Jean-Noël Barrot a présenté en Conseil des ministres un projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique. Il s’agit pour le Ministre de répondre aux « inquiétudes, aux difficultés et parfois aux souffrances que causent le numérique dans la vie quotidienne des français. »

Ce projet de loi s’appuie sur divers règlements européens tels que le Digital Service Act (DSA) et le Digital Markets Act, sur les travaux parlementaires concernant les enjeux du numérique, ainsi que sur des consultations publiques menées au sein du Conseil National de la Refondation.

Les mesures proposées visent à protéger les citoyens, les mineurs, les entreprises et les collectivités, et enfin, la démocratie.

L’occasion d’un rapide tour d’horizon.

La mise en place d'un projet de loi qui d'assure la protection des citoyens français

Tout d’abord, un premier constat : au moins 51% des Français ont été victimes d’une tentative d’accès frauduleuse à leurs données. La cybercriminalité du quotidien se professionnalise.

Pour répondre à cette menace, ce projet de loi prévoit la mise en place d’un filtre de cybersécurité anti-arnaque.

Concrètement, et à titre d’exemple, lorsque vous recevrez un SMS frauduleux imitant l’assurance maladie et vous invitant à cliquer sur un lien pour y déposer vos coordonnées bancaires, un message vous indiquera que le site vers lequel vous vous dirigez est compromis.

Le texte prévoit en outre une peine complémentaire de bannissement des réseaux sociaux pour les personnes reconnues coupables de cyberharcèlement. La violence du cyberharcèlement se déplaçant d’un réseau social à l’autre, l’objectif est ici d’empêcher les cyberharceleurs de multiplier leurs terrains d’attaques. Pour cela, il est prévu que les juges puissent empêcher, pour une durée de 6 mois, la réinscription des personnes condamnées sur les réseaux sociaux.

Autre sujet d’attention : les jeux en ligne.

Le projet de loi porté par le Ministre envisage de définir un régime pionnier et protecteur des utilisateurs pour encadrer les nouveaux jeux en ligne, fondés sur la technologie émergente du web 3. Ce régime a vocation à offrir les garanties nécessaires à la protection des mineurs, à la lutte contre le blanchiment, tout en facilitant le développement en France de ce type d’activité innovantes.

La protection des mineurs? 

Autre constat rappelé par le Ministre : chaque mois, deux millions d’enfants sont exposés à des contenus pornographiques. Les sites pornographiques ne sont pas assez vigilants à l’égard de l’âge de leurs utilisateurs.

Pour cette raison, le projet de loi envisage de permettre à l’ARCOM de prononcer le blocage, le déréférencement et une sanction dissuasive (pouvant aller jusqu’à 4% du chiffre d’affaires) à l’égard des sites pornographiques qui refusent de mettre en place une vérification fiable et sans fichage de l’âge de leurs utilisateurs.

En outre, 1 an d’emprisonnement et 250 000 euros d’amende pourront être prononcés contre les hébergeurs qui ne retireront pas les contenus pédopornographiques qui leur seront signalés par les forces de l’ordre.

Enfin, en application directe du DSA, la publicité ciblée sur les mineurs ou à partir des données sensibles sera interdite.

Un projet de loi qui intègrera des dispositions pour assurer la protection des entreprises et des collectivités

Au-delà de la protection des citoyens et des mineurs, le Ministre entend également intégrer au projet de loi des dispositions protectrices des entreprises. Là encore, le constat effectué est tout à fait parlant : 70% des parts de marché du cloud sont détenus par trois fournisseurs en France.

Le texte souhaite favoriser l’interopérabilité des services cloud afin de concrétiser le droit à la portabilité des données d’une entreprise chez une autre fournisseur. Ainsi, il prévoit de faciliter le changement de fournisseur par les entreprises en interdisant tout frais de transfert. Une sanction d’un milliard d’euros est prévue en cas de non-respect de cette interdiction. En sus, il devra être possible pour une entreprise d’avoir plusieurs fournisseurs, afin de réduire toute dépendance.

Par ailleurs, ce projet de loi prévoit la création d’une base de données unique pour recenser l’activité des meublés de tourisme loués via les plateformes. La création d’un intermédiaire chargé de standardiser et partager les données permettra une régulation plus efficace et moins coûteuse.

Dernier point abordé par le Ministre : la protection de la démocratie

La lutte contre la désinformation en ligne sera notamment favorisée par la possibilité pour l’ARCOM d’enjoindre tout site internet de faire cesser la diffusion de contenus de médias faisant l’objet de sanctions internationales. Sans réaction de la part de tels sites dans les 72h suivants cette mise en demeure, l’ARCOM pourra ordonner leur blocage.

La faisabilité technique de l’ensemble de ces mesures est encore à challenger, à mesurer tant les défis sont importants. La question de la compatibilité de ses mesures avec d’autres exigences réglementaires comme le RGPD sera également à traiter.

En tout état de cause, force est de constater que ce projet de loi s’attache à restaurer la confiance des Français en l’espace numérique. Il devrait être prochainement consolidé et précisé lors des débats parlementaires qui débuteront au mois de juillet.

Affaire à suivre…

***

Le cabinet HAAS Avocats est spécialisé depuis plus de vingt-cinq ans en droit des nouvelles technologies et de la propriété intellectuelle. Il assiste et défend les personnes physiques et morales dans le cadre de contentieux judiciaires et extrajudiciaire. Dans un monde incertain, choisissez de vous faire accompagner par un cabinet d’avocats fiables. Pour nous contacter, cliquez ici.

Haas Avocats

Auteur Haas Avocats

Suivez-nous sur Linkedin