Plateformes : attention aux pratiques commerciales sanctionnées par le DSA

Plateformes : attention aux pratiques commerciales sanctionnées par le DSA
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Par Haas Avocats

Dans le cadre du réseau de coopération en matière de protection des consommateurs (réseau CPC), les autorités nationales de protection des consommateurs de Belgique, France, Irlande et Pays-Bas, ont identifié de multiples pratiques commerciales trompeuses et déloyales sur une très grande plateforme d'e-commerce spécialisée dans la "fast fashion".

Cette action coordonnée entre les autorités de plusieurs Etats membres de l’Union européenne s'inscrit dans un cadre réglementaire européen de plus en plus strict envers les plateformes numériques transfrontalières. Elle illustre l'application conjointe de deux régimes juridiques complémentaires : d'une part, les dispositions classiques de protection des consommateurs et d'autre part, la nouvelle réglementation sur les services numériques (DSA).

Les infractions qui ont été constatées au cours de cette action coordonnée permettent également de revenir sur certaines pratiques interdites dans le commerce électronique et la responsabilité des places de marché vis-à-vis de cette réglementation.

Les pratiques commerciales trompeuses et déloyales constatées sur la Plateforme

Pratiques promotionnelles trompeuses

L'enquête a identifié plusieurs techniques commerciales contraires au droit européen, notamment l'affichage de "fausses réductions" non basées sur les prix de vente antérieurs réels.

Ces pratiques constituent une violation caractérisée de la Directive relative aux pratiques commerciales déloyales, qui prohibe expressément la communication d'informations fausses concernant les conditions tarifaires.

En France, l’affichage des réductions de prix est strictement encadré par l’article L112-1-1 du Code de la consommation.

Techniques de vente sous pression

SHEIN est également accusée de recourir à des "techniques de vente sous pression", notamment par l'utilisation de mécanismes créant artificiellement un sentiment d'urgence chez les consommateurs. Ces comptes à rebours fictifs et autres dispositifs psychologiques sont expressément interdits par la législation européenne visant à garantir un consentement libre et éclairé du consommateur et peuvent faire l’objet de condamnations pénales au titre des pratiques commerciales trompeuses (Article L132-2 Code de la consommation).

Défaut d'information sur les droits de rétractation

Les autorités ont également relevé des manquements significatifs concernant l'information des consommateurs sur leurs droits de rétractation et de remboursement (notamment prévus aux Articles L221-18 et suivants du Code de la consommation). Ces droits, piliers du cadre juridique européen de protection des consommateurs en matière de commerce électronique, sont insuffisamment détaillés ou présentés de façon erronée sur la plateforme, ce qui constitue une entrave à leur exercice effectif.

Allégations environnementales trompeuses ("greenwashing")

Une dimension particulièrement préoccupante concerne la diffusion d'informations trompeuses relatives aux caractéristiques environnementales des produits commercialisés. Ces pratiques de "greenwashing" s'inscrivent dans un contexte de vigilance accrue des autorités européennes face aux allégations écologiques infondées, au moment même où l'Union renforce son dispositif juridique avec la Directive sur les allégations écologiques.

Défaut de transparence et d'accessibilité

Le réseau CPC a également pointé l'opacité du service client de SHEIN, dont les coordonnées sont délibérément difficiles d'accès. Cette dissimulation entrave considérablement l'exercice des droits des consommateurs, notamment en cas de litige, et contrevient aux dispositions réglementaires sur la transparence des plateformes d'intermédiation en ligne.

En France, les places de marché en ligne doivent fournir de nombreuses informations obligatoires aux consommateurs qui sont notamment prévues par un décret du 7 juillet 2024.

L'obligation de la mise en conformité des pratiques commerciales des Marketplaces au DSA

Pour les professionnels du commerce électronique, cette affaire souligne l'importance cruciale d'intégrer les exigences du droit de la consommation dès la conception de leurs interfaces et processus commerciaux. En effet, la conformité ne peut pas être considérée comme optionnelle, même pour les acteurs établis hors du territoire de l'Union mais ciblant le marché européen.

Par ailleurs, l’action coordonnée des autorités nationales de protection des consommateurs montre une harmonisation de la réglementation européenne en matière de vente en ligne et de services numériques. Les différents régulateurs semblent parfaitement articuler leur cadre réglementaire respectif de protection des consommateurs avec les nouvelles obligations sectorielles issues du DSA. Les opérateurs économiques souhaitant développer leur activité au sein du marché intérieur ne peuvent ainsi pas faire abstraction du niveau élevé de protection des consommateurs et de l’exigence de loyauté des pratiques commerciales.

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