Par Gérard Haas et Aurélie Puig
La Cour de cassation du 5 juin 2019[1] a condamné la cliente d’une prestation informatique pour défaut de collaboration.
Dans les faits, une société cliente commercialise des vêtements sur internet. A cette fin, elle conclut un contrat de prestation informatique pour la refonte de son site internet. La société informatique en charge de cette mission, demande – en vain - des informations à sa cliente concernant ses besoins. Mais ces réclamations restent sans réponse.
Après la refonte du site internet terminée, la cliente conteste le montant de la facture, qui est supérieur au devis signé, et exige la restitution de l’acompte versé pour « inexécution des prestations commandées ».
Or, dans une solution qui n’est pas nouvelle, la Cour de Cassation condamne la cliente à payer la somme de 12 120 €, assortie des intérêts. Il existe, en effet, « un devoir de collaboration », imposé au client d’une prestation informatique, et ce, indépendamment de toute clause contractuelle.
L’exigence de collaboration dans les contrats informatiques est née de la jurisprudence, comme corolaire de l’obligation d’information et de conseil. Elle est fondée sur l’article 1104 du code civil, qui impose aux parties d’un contrat d’être de « bonne foi ».
La complexité des contrats/prestations informatiques nécessite que les parties conjuguent leurs efforts. Si de prime abord, on pense au professionnel informatique qui doit informer et conseiller son client, mais aussi le mettre en garde, on oublie souvent que ce dernier est aussi titulaire d’une obligation de coopération. En effet, le client doit participer activement à la réalisation de la prestation informatique, la Cour ayant qualifié « d’essentiel »[2] ce devoir de coopération en matière informatique.
Les manifestations du devoir de collaboration entre les parties impliquent que celles-ci facilitent l’exécution du contrat. Il y a défaut de collaboration si le cocontractant rend impossible/difficile l’exécution du contrat, par exemple, en ne participant pas à la définition et l’expression de ses besoins (absence de cahier des charges), ou encore, en ne précisant pas le choix du matériel adapté, au regard des nécessités de la prestation.
Ainsi, le client est tenu par une obligation de coopération, d'implication, de dialogue avec son prestataire informatique.
Dans l’arrêt du 5 juin 2019, les juges ont décidé que la conception ou la refonte d’un site internet exige la participation active du client. Celui-ci est tenu de fournir les informations nécessaires au prestataire, faute de quoi, il ne peut mener à bien sa mission. Il en résulte que cette « collaboration fait nécessairement partie du périmètre contractuel ».
Or, en l’espèce, le prestataire informatique n’avait pas remis ses conditions générales de vente à la cliente. Mais la Cour reste indifférente aux stipulations contractuelles informatiques, car elle précise que l’obligation de collaboration entre « nécessairement dans le périmètre contractuel » quand bien même aucune clause ne la prévoit.
En conclusion, le contrat informatique bénéficie -comme tous les contrats- d’une obligation d’exécution de bonne foi. Mais celle-ci est bien plus exigeante dans les prestations informatiques puisqu’elle implique une véritable initiative de la part du client dans la détermination de ses besoins.
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[1] Com. 5 juin 2019, n°17-26.360
[2] – Bordeaux, 13 mars 2013, RG no 11/01836. – Limoges, 21 déc. 2015, RG no 14/01136.