Les risques d'utilisation des données de vendeurs tiers sur sa plateforme

Les risques d'utilisation des données de vendeurs tiers sur sa plateforme
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Par Haas Avocats

L’émergence de plateformes numériques avec la double casquette d’opérateur de marketplace et de vendeur suscite, dans certains cas, des préoccupations au regard du droit de la concurrence.

Le cumul des activités n’est pas interdit per se. Ce principe trouve néanmoins sa limite dans la matérialisation de pratiques visant à favoriser l’activité de vente proposée par l’opérateur (ou une société liée) via la collecte des données générées dans le cadre de l’activité de fourniture du service de marketplace.

Ces pratiques sont souvent désignées sous le terme d’ « imitation par les initiés ». Elles se matérialisent généralement par :

  • D’une part, l’observation de l’activité des vendeurs et l’offre de produits proposée ;
  • D’autre part, le positionnement d’une offre concurrente et compétitive nourrie de cette observation.

L’analyse de ces données (de toute nature) permet aux marketplaces d’ajuster leurs propres stratégies commerciales et de décider des produits à mettre en avant ou à développer. Sans aucune étude de marché, ces acteurs arrivent ainsi à anticiper l’imprévisibilité qui entoure normalement le lancement d’un nouveau produit.

Une telle pratique est-elle pour autant anticoncurrentielle ?

On pourrait considérer que, dans la mesure où elle permet de positionner une offre concurrente de qualité et à un prix plus bas, elle sert les intérêts du consommateur.

Ce n’est pourtant pas la position des autorités de concurrence, ni de la réglementation actuelle, lesquelles considèrent que de telles pratiques, pour les entreprises en situation de domination ou qui entrent dans la qualification des contrôleurs d’accès, sont anticoncurrentielles car elles entravent le jeu de la concurrence et limitent l’innovation.

L’utilisation des données non-publiques des vendeurs : une pratique sous-surveillance

Les dérives du recours à une telle pratique ont été révélées par la Commission européenne à l’occasion de l’affaire Amazon. C’est sur cette base que, le 17 juillet 2019, elle a ouvert une enquête sur les pratiques d’Amazon qu’elle soupçonnait d’enfreindre les règles du droit de la concurrence en tirant abusivement profit des données collectées des vendeurs utilisant sa place de marché, pour favoriser la vente de ses propres produits.

La Commission européenne avait conclu qu’une telle pratique permettait à Amazon de disposer de « conclusions précises et ciblées équivalentes » à une vaste étude de marché et d’éviter les risques normaux de la concurrence.

Au regard de la position dominante d’Amazon, la Commission européenne estimait que cette pratique était susceptible de constituer un abus de position dominante pouvant affecter le commerce dans l’UE et fausser ou restreindre la concurrence (article 102 du TFUE).

La procédure n’est néanmoins pas allée à son terme, Amazon ayant pris des engagements aux termes desquels elle s’abstient :

  • d’utiliser toute donnée non publique relative aux vendeurs (y compris celles combinées avec des données non relatives aux vendeurs) à des fins d’opérations de vente au détail en concurrence avec les vendeurs. ;
  • de « mettre en œuvre des mécanismes d’audit et de contrôle internes réguliers »pour évaluer le respect de cet engagement.

En cas de non-respect de ces engagements, Amazon encourt une amende pouvant aller jusqu’à 10% de son chiffre d’affaires annuel total (amende qui serait automatique, dans la mesure où elle ne nécessiterait pas de prouver une violation des règles de la concurrence) ou une astreinte journalière de 5% par jour du chiffre d’affaires quotidien d’Amazon.

L’utilisation des données non-publiques des vendeurs : une pratique possiblement anticoncurrentielle

Partant du constat que les gatekeepers tirent profit de leur double rôle d’opérateur et de vendeur pour fausser la concurrence au détriment des entreprises utilisatrices de leurs marketplaces, le Digital Markets Act (DMA) a créé une obligation dédiée.

Aux termes de l’article 6.1 a), est expressément interdite l’utilisation par les marketplaces, cumulant le statut d’opérateur et de vendeur, des données non accessibles au public qui sont transmises par les vendeurs ou générées par leurs activités ou leurs utilisateurs finaux lorsque ces marketplaces se trouvent en concurrence avec ces vendeurs indépendants.

Si la position est claire pour les plateformes considérées comme des contrôleurs d’accès, elle ne l’est pas pour les plateformes qui seraient en situation de domination.

En effet, dans ce cas, l’appréciation d’une atteinte à la concurrence et partant la qualification d’un risque de pratique anticoncurrentielle, nécessitera une analyse spécifique prenant en considération la situation concrète (position de l’acteur sur le marché, pratique mise en œuvre, typologie de données non-publiques utilisées, finalité de cette utilisation, etc..).

Les marketplaces doivent être vigilantes sur ces usages et systématiquement réaliser une analyse d’impact.

Cela permettra :

  • de mesurer le risque au regard du droit de la concurrence,
  • mais aussi de documenter le risque et les mesures d’atténuation déployées.

Dans le cadre de la compliance demandée aux règles de la concurrence, de tels documents auront un impact certain notamment en cas de contrôle d’une autorité de concurrence et l’éventuelle négociation d’une procédure transactionnelle.

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Le cabinet HAAS Avocats est spécialisé depuis plus de vingt-cinq ans en droit des nouvelles technologies et de la propriété intellectuelle. Il accompagne de nombreux acteurs du numérique dans le cadre de leurs problématiques relatives au droit de la concurrence et au droit des plateformes. Dans un monde incertain, choisissez de vous faire accompagner par un cabinet d’avocats fiables. Pour nous contacter, cliquez ici.

 

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