Les règles de preuve à respecter dans une affaire de litige prud'homal

Les règles de preuve à respecter dans une affaire de litige prud'homal
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Par Haas Avocats

La preuve constitue un élément capital au sein de tout procès. Or, cette arme absolue doit répondre à certaines exigences afin d’être reçue par le juge et versée au débat.

Dans cet article nous répondrons au sujet suivant : Comment préparer une affaire de litige prud'homal d'appropriation de documents d'entreprise : les règles de preuve à respecter.

 

Par un arrêt du 9 novembre 2022, la chambre sociale de la Cour de cassation confirme sa position concernant les conditions d’appropriation, par un ancien salarié, de documents appartenant à l’entreprise, dans un litige l’opposant à son employeur.

 

L’occasion de refaire le point sur les moyens de preuve admissibles en matière prud’homale face au contrôle de proportionnalité jurisprudentiel.

 

Comment est régie la preuve en matière prud’homale ?

 

Sur le terrain prud’homal, la preuve est libre tant qu’elle respecte le principe essentiel de loyauté.

 

À cet égard, la jurisprudence statue régulièrement sur le caractère loyal ou non d’une preuve apportée par un ancien salarié ou par un employeur, toute preuve obtenue par des moyens illicites devant a priori être écartée des débats.

 

À titre d’exemple, la chambre sociale de la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de considérer que des preuves obtenues grâce à un dispositif automatisé de contrôle de la messagerie d’un salarié mis en œuvre par l’employeur sans avoir effectué au préalable une déclaration auprès de la CNIL, doivent être considérées comme illicites.

 

Pour autant, dans un arrêt plus récent, la Cour de cassation rappelait que n’était pas nécessairement écartée des débats une preuve obtenue en violation des dispositions de la Loi Informatique et Libertés, à condition notamment pour le juge « d’apprécier si l’utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble ».

Quelles sont les conditions de recevabilité de la preuve ?

Dans l’affaire tranchée par la Cour de cassation en date du 9 novembre 2022, un salarié était licencié pour faute grave, ce dernier ayant, après la réception de la convocation à son entretien préalable, procédé à un transfert de plus de 200 mails professionnels vers sa boite personnelle.

 

La Cour de cassation devait donc se pencher sur la question de savoir si ces données transférées pouvaient être utilisées comme preuve dans le litige prud’homal qui lui était soumis, ce à quoi elle répond par la négative, au regard de la loyauté de la preuve.

À cet égard, la Cour rappelle que les documents produits par un salarié dans le cadre d’un litige doivent répondre à deux conditions :

  • Le salarié doit en avoir eu connaissance à l’occasion de l’exercice de ses fonctions;
  • La production de ces éléments de preuve doit être strictement nécessaire à la défense du salarié dans le cadre du différend avec son employeur.

Par conséquent, la chambre sociale considère, pour rejeter les preuves apportées par le salarié en l’espèce, que :

  • En présence d’une clause de confidentialité à laquelle est tenu le salarié, de tels transferts de données doivent être considérés comme illégaux. Ils constituent un mode de preuve déloyal, et ne peuvent pas, par conséquent, être versés au débat ;
  • L’engagement d’une procédure de licenciement à l’encontre du salarié ne peut justifier le caractère strictement nécessaire du transfert des données pour assurer sa défense.

Quelle interprétation est faite du principe de loyauté de la preuve aujourd’hui ?

Afin d’établir si une preuve est recevable, les juges procèdent toujours à un contrôle de proportionnalité. Ils effectuent une mise en balance entre le droit à la preuve et les droits et libertés fondamentaux de l’employeur ou du salarié (vie privée, liberté d’expression, …).

Ainsi, face à cette constante mise en balance des intérêts, la chambre sociale de la Cour de cassation a pu juger :

  • Recevable une enquête externe de harcèlement réalisée à l’insu du salarié visé par la plainte ou encore l’utilisation d’un système de vidéosurveillance dans une pharmacie particulièrement exposée à des risques de vol et agressions, mais n’ayant pas fait l’objet d’une consultation des représentants du personnel,
  • Irrecevable un enregistrement issu de caméras mises en place par l’employeur et filmant constamment le salarié sur son lieu de travail, une telle pratique étant particulièrement ostentatoire aux droits et libertés des personnes.

Au-delà de cette appréciation in concreto des différentes preuves versées au débat, par le biais d’un contrôle de proportionnalité, les juges ont également la lourde tâche de veiller au respect de la charge de la preuve, afin qu’un juste équilibre soit trouvé entre le droit à la preuve et la protection de nos libertés fondamentales.

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