Le droit des marques au défi des NFT

Le droit des marques au défi des NFT
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Par Gérard Haas et Claire Benassar

Les nouvelles technologies se sont très vite emparées de nombreux domaines et se sont immiscées de façon exponentielle dans différents secteurs tels que la culture, l’art, ou le luxe, venant mettre à l’épreuve le droit de la propriété intellectuelle.

A cet égard, les NFT, certificats de propriété implémentés sur blockchain, semblent désormais venir défier la lutte anti-contrefaçon.

Les NFT à l’épreuve du contentieux et du droit des marques

Dès 2016, la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) s’était penchée sur la question des NFT, plus particulièrement sur l’insertion, dans les métadonnées d’un token, d’un lien permettant de renvoyer vers un fichier portant sur une œuvre de l’esprit protégée par le droit d’auteur.

A cet égard, la Cour a considéré que cette insertion pourrait ne pas être qualifiée d’acte de contrefaçon dans la seule hypothèse où l’émetteur du NFT ne serait pas à l’origine de la publication de l’œuvre visée par le lien et où le NFT ne serait pas monétisé[1].

Si les juridictions ne se sont à ce jour pas prononcées quant au possible caractère contrefaisant d’un NFT en lui-même, une problématique majeure émerge concomitamment à leur développement croissant : les plateformes ne permettent pas de s’assurer que le déposant du NFT en est le créateur, les droits de propriété intellectuelle de ce dernier pouvant ainsi aisément être violés.

Par exemple, l’affaire « MetaBirkin », opposant l’artiste Mason Rothschild à la Maison Hermès, s’agissant de la mise en vente d’une collection de NFT par l’artiste consistant en des déclinaisons du sac à main « Birkin ».

Titulaire de plusieurs marques nationales et internationales « BIRKIN » – verbales et tridimensionnelles – déposées notamment en classe 18 pour des « Sacs à main », Hermès avait souligné ne pas avoir consenti à la commercialisation du sac Birkin dans le metaverse, mettant de facto l’émetteur des NFT en demeure avant de déposer une plainte auprès d’un tribunal de la juridiction de New York en janvier dernier.

Plus récemment, de façon analogue, Nike a porté plainte contre la plateforme de e-commerce StockX en raison de la vente de plusieurs centaines de NFT représentant des paires de baskets estampillées Nike, sans avoir obtenu son aval.

Le contentieux à l’épreuve des NFT

Les émetteurs des NFT en cause estimant quant à eux être en droit de créer et de vendre les tokens litigieux, se pose la question de la possibilité, pour ces biens numériques, d’être constitutifs d’actes de contrefaçon.

En France, l’article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle précise que, sauf autorisation du titulaire de la marque antérieure, l’usage d'un signe identique ou similaire à celle-ci et utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux pour lesquels elle est enregistrée est interdit s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public.

En ce sens, la mise en vente de NFT reproduisant une marque antérieure pourrait selon toute vraisemblance être contrefaisante et, en conséquence, engager la responsabilité civile de l’émetteur du NFT[2].

Encore faut-il toutefois que des biens virtuels puissent être considérés comme similaires aux biens tangibles qu’ils représentent.

La jurisprudence ne s’étant pour l’heure pas positionnée sur cette question et la notion de NFT restant encore étrangère au code de la propriété intellectuelle, il demeure indispensable d’anticiper les évolutions à venir en la matière dans la gestion et l’exploitation de son portefeuille de marques, en adoptant les stratégies adéquates.

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Le cabinet HAAS Avocats est spécialisé depuis plus de vingt-cinq ans en droit des nouvelles technologies et de la propriété intellectuelle. N’hésitez pas à faire appel à nos experts pour vous conseiller. Pour nous contacter, cliquez-ici.

[1] CJUE 8 septembre 2016 – Affaire C-160/15

[2] Conformément à l’article L.716-4 du code de la propriété intellectuelle, « L'atteinte portée au droit du titulaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. »

Gérard HAAS

Auteur Gérard HAAS

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