L'actualité juridique numérique de la semaine – 24 novembre 2025

L'actualité juridique numérique de la semaine – 24 novembre 2025
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Gérard Haas et son équipe ont compilé pour vous les actualités clés afin de vous permettre de rester à jour sur les dernières tendances et évolutions des secteurs juridique et numérique ! 

 

 

👉 Consultez dès maintenant notre sélection :

Actualité 1 - En Chine, le marché des lunettes IA vit son “moment iPhone” 
Actualité 2 - Logement social : consultation publique de la CNIL sur des projets de fiches et de référentiels 
Actualité 3 - Masculinisme, rabatteur, contrefaçon… Les pistes de la nouvelle loi pour réguler les influenceurs
Actualité 4 - « Pourquoi Grok n’est pas une IA comme les autres » et « L’enquête sur la plateforme X étendue à des propos négationnistes publiés par son IA Grok »
Article 5 - Renonciation possible au droit à l'information en vertu de l'article 15 du RGPD
Article 6 - L’inopérance du droit commun pour la qualification du contrat à distance (Cass, 1ère civ., 5 nov. 2025, n°23-22.883)

Actualité 1 - En Chine, le marché des lunettes IA vit son “moment iPhone” 

Les Echos présentent comment la Chine voit l’émergence d’un marché naissant des lunettes intégrant l’intelligence artificielle, en plein décollage, en le comparant à l’effet produit autrefois par l’arrivée de l’iPhone.

Contexte
Dans un contexte où l’IA devient un vecteur majeur de différenciation dans l’électronique grand public, la Chine cherche à positionner ses fabricants et start-ups à l’avant-garde des lunettes « intelligentes ». Après des années de prototypes et d’initiatives timides, un marché s’organise autour de lunettes connectées dotées de fonctionnalités IA (traduction, affichage, assistance…) — en parallèle de l’accélération des usages et de l’intégration de l’IA dans les objets portables.

Résumé des faits

  • Plusieurs entreprises chinoises ont présenté ou lancé des lunettes intégrant des fonctions d’intelligence artificielle : détection visuelle, traduction en temps réel, affichage dans le champ de vision, et interaction vocale.

  • Le marché chinois bénéficie d’un terrain favorable : forte adoption des objets connectés, subventions ou soutien des pouvoirs publics à l’IA, chaîne d’approvisionnement locale robuste.

  • Les acteurs observent une montée en puissance de modèles grand public, alors que jusqu’à présent, les lunettes intelligentes restaient des produits niche ou de démonstration.

  • Comparaison est faite à l’arrivée de l’iPhone : les lunettes IA sont vues comme le prochain « moment » symbolique, susceptible de créer un nouveau marché de masse et de redéfinir un usage technologique personnel.

  • Les constructeurs visent à démocratiser le dispositif, réduire les prix, améliorer l’autonomie, affiner le design — afin de passer du gadget à un appareil accepté du grand public.

  • Toutefois, des obstacles demeurent : la maturité technologique (batterie, forme, confort, usages), la perception du public, les questions de vie privée et de régulation, ainsi que la concurrence internationale.

Impact juridique
L’émergence de ce type de dispositif pose des enjeux juridiques et réglementaires majeurs : l’intégration de l’intelligence artificielle et de capteurs dans des lunettes ouvre des questions de protection des données personnelles (captation d’images, enregistrement audio, géolocalisation), de vie privée (notamment en public ou dans des espaces privés), et de conformité aux réglementations en matière d’IA (transparence, responsabilité, biais). En Chine, comme ailleurs, un tel développement pourrait entraîner des exigences accrues de conformité aux cadres de cybersécurité et de contrôle des flux de données, voire des obligations de certification pour les dispositifs intégrant de l’IA avant mise sur le marché.

Lien vers l'article : Les Echos

Actualité 2 - Logement social : consultation publique de la CNIL sur des projets de fiches et de référentiels 

La CNIL présente l’ouverture d’une consultation publique destinée à actualiser les outils d’accompagnement (fiches pratiques et référentiels) à destination des organismes du logement social pour se conformer à la réglementation « Informatique & Libertés ».

Contexte
La CNIL avait publié en 2014 un « pack logement social » composé de fiches pratiques et outils de référence avant l’entrée en vigueur du RGPD. Avec l’évolution juridique (entrée en application du RGPD en 2018) et les évolutions techniques & organisationnelles du secteur du logement social, il devient nécessaire de mettre à jour ces outils pour aider les acteurs du secteur à se conformer aux normes de protection des données.

Résumé des faits

  • La CNIL lance une consultation publique jusqu’au 15 février 2026, invitant l’ensemble des acteurs du logement social à formuler leurs observations.

  • Les documents soumis à consultation comprennent dix fiches abordant les principes « Informatique et Libertés » appliqués au secteur (finalité, minimisation, base légale, etc.). 

  • Trois fiches thématiques sont également proposées : les outils de vidéosurveillance et d’accès aux immeubles ; les enquêtes menées par les bailleurs sociaux ; l’installation d’objets connectés.

  • Trois référentiels sont dédiés aux traitements les plus courants dans le secteur du logement social : demandes de logement social / relogement / mutation ; gestion locative ; accession sociale à la propriété. 

  • Les nouveaux outils visent les organismes du logement social (offices publics de l’habitat, sociétés anonymes coopératives HLM, SEM immobilières, services de l’État, collectivités territoriales) ainsi que les personnes concernées par ces traitements (bénéficiaires de logement social, collaborateurs). 

Impact juridique
Cette initiative de la CNIL souligne un renforcement de l’encadrement juridique pour le secteur du logement social en matière de protection des données personnelles. L’actualisation des fiches et référentiels correspond à une obligation de conformité accrue liée au RGPD et à la loi « Informatique et Libertés », exigeant des responsables de traitement qu’ils identifient clairement leurs finalités, bases légales, durées de conservation, responsabilités et mesures de sécurité. Le fait que la CNIL propose des outils sectoriels dédiés renforce la dimension normative de sa mission : les organismes du logement social devront démontrer leur conformité (par exemple via des registres de traitement et analyses d’impact). Le calendrier imposé et l’appel à consultation publique participent à la transparence et à une meilleure appropriation des exigences juridico-réglementaires par les acteurs concernés.

Lien vers l'article : La CNIL

Actualité 3 - Masculinisme, rabatteur, contrefaçon… Les pistes de la nouvelle loi pour réguler les influenceurs

Le média Le Point traite ce sujet en exposant les lacunes d’un premier dispositif législatif et en présentant les axes d’un rapport parlementaire à venir qui vise à renforcer l’encadrement des influenceurs et des plateformes numériques. 

Contexte
Deux ans après l’adoption d’une première loi française visant à encadrer l’influence commerciale sur les réseaux sociaux, un nouveau rapport — à remettre mi-décembre — est chargé d’identifier les nouvelles dérives observées (rabatteurs vers plateformes érotiques, discours masculinistes, contrefaçons via le commerce en ligne) afin de proposer une seconde loi « influenceurs 2 ». 

Résumé des faits

  • Le rapport parlementaire, mené notamment par les députés Arthur Delaporte (PS) et Stéphane Vojetta (ex-député « En Marche »), vise à remettre un document au gouvernement en décembre.

  • Un des volets ciblés est celui des « rabatteurs » : démarchage de très jeunes filles sur les réseaux sociaux pour les orienter vers des plateformes payantes d’échange de contenu à caractère érotique ou pornographique. Exemple citée : sur 44 jeunes filles de 16 ans dans une classe, 14 auraient déjà reçu de telles propositions. 

  • Le rapport pointe aussi la montée des contenus « masculinistes » sur les réseaux sociaux — discours de domination masculine, apologie de la violence antifemmes, vente de formations à la « séduction » — et propose d’interdire la promotion de ces discours. 

  • L’économie numérique et le commerce en ligne via les influenceurs sont également visés : la plateforme TikTok (notamment son module « TikTok Shop ») est accusée de permettre l’inondation du marché par des produits de mauvaise qualité ou contrefaits ; le rapport veut obliger la plateforme à respecter le droit européen, limiter les promotions massives, et garantir que les revenus des influenceurs soient bien déclarés et imposés. 

  • Les auteurs veulent également accélérer les procédures judiciaires visant les plateformes ou réseaux sociaux, proposer une procédure de « plaider coupable » pour les plateformes et promouvoir la saisie conjointe des parquets spécialisés afin de mieux coordonner les enquêtes numériques. 

Impact juridique
Ce projet de réforme témoigne d’un renforcement imminent du cadre juridique encadrant l’activité d’influenceurs et des plateformes numériques en France. Il pourrait donner lieu à : l’encadrement de la profession « agent d’influenceur », la création de nouvelles infractions pénales pour démarchage agressif de mineures ou promotion de discours masculinistes, l’obligation pour les plateformes d’assurer la conformité des produits qu’elles facilitent avec le droit européen, et une responsabilisation accrue des influenceurs quant à la déclaration fiscale de leurs revenus. En outre, le renforcement des procédures judiciaires et la coordination des parquets spécialisés constituent un élargissement du dispositif d’application du droit existant, ce qui pourrait modifier de manière significative la stratégie de conformité des acteurs du secteur.

Lien vers l'article : Les Echos

Actualité 4 - « Pourquoi Grok n’est pas une IA comme les autres » et « L’enquête sur la plateforme X étendue à des propos négationnistes publiés par son IA Grok »

Le média Le Monde traite conjointement l'enchaînement d’une IA développée par Elon Musk via sa plateforme X, et l’élargissement d’une enquête judiciaire en France après des propos négationnistes générés par cette IA, pour souligner les spécificités inquiétantes de ce modèle et les implications juridiques.

Contexte
Grok est un chatbot conversationnel lancé par la société xAI (liée à Elon Musk) intégré à la plateforme X (ex-Twitter). Il a été conçu pour se positionner comme une alternative « moins woke » à d’autres grands modèles de langage, avec des règles de modération plus souples. En novembre 2025, le parquet de Paris a annoncé l’extension de son enquête sur X à des propos négationnistes publiés par Grok, notamment concernant les chambres à gaz d’Auschwitz. 

Résumé des faits

  • Grok, qui se présentait comme un chatbot intégré à X, a diffusé des réponses problématiques, notamment en contestant la fonction des chambres à gaz du camp d’extermination d’Auschwitz, en affirmant qu’elles auraient été conçues pour la désinfection au Zyklon B plutôt que pour l’exécution de masse. 

  • Le parquet de Paris a élargi une enquête déjà en cours sur X (initialement ouverte pour « altération du fonctionnement d’un système automatisé de traitement de données ») aux propos émanant de Grok considérés comme négationnistes.

  • L’article d’analyse de Le Monde note que Grok n’est pas une IA « comme les autres » car son positionnement, ses réglages et son intégration dans un réseau social à large audience le rendent particulièrement vulnérable à la diffusion de contenus à risque, de désinformation ou de discours extrêmes. 

  • Le modèle semble avoir moins de filtres ou de modération que certains concurrents, ce qui augmente le risque de « dérails » (hallucinations, biais idéologiques, contenus extrêmes) — et ce d’autant plus qu’il est au cœur d’un réseau social à des centaines de millions d’utilisateurs.

  • L’enquête signale aussi les liens entre l’architecture de la plateforme, ses règles de modération, la responsabilité éditoriale des contenus générés par l’IA, et la difficulté de tracer ou d’imputer les conséquences de tels propos à un acteur unique.

Impact juridique
Cet ensemble de faits met en lumière plusieurs enjeux juridiques majeurs : d’une part, la diffusion de propos négationnistes engage potentiellement la responsabilité pénale de l’auteur (ou du diffusant) aux termes du droit français qui réprime la contestation de crimes contre l’humanité. L’IA Grok générant de tels propos pose la question de l’imputabilité : qui est responsable — le développeur, l’éditeur de la plateforme, l’utilisateur ? D’autre part, l’enquête sur la plateforme X montre que les systèmes automatisés (IA + réseau social) peuvent être mis en cause pour « altération du fonctionnement d’un système de traitement automatisé de données » ou diffusion de contenus illégaux. Enfin, ce cas souligne l’urgence de réguler les modèles d’IA déployés à grande échelle dans des contextes publics, y compris par l’application de cadres européens comme le Digital Services Act ou le futur règlement AI Act, qui imposent transparence, contrôle et obligation de conformité quant aux biais, aux contenus et à la sécurité des systèmes d’IA. De fait, les plateformes pourraient être tenues de répondre juridiquement des contenus générés par leurs IA, ou d’implémenter des mécanismes de contrôle renforcés pour limiter les dérives.

Lien vers les articles : Enquête sur la plateforme X et Grok, machine à désinformer

Article 5 - Renonciation possible au droit à l'information en vertu de l'article 15 du RGPD

Le média Lexology traite la validité d’une renonciation au droit à l’information prévu par l’article 15 du Règlement général sur la protection des données (RGPD) à l’occasion d’un accord de rupture d’un contrat de travail. 

Contexte
Un salarié avait demandé à son ancien employeur une communication d’informations exhaustive en vertu de l’art. 15 RGPD. L’employeur n’avait pas répondu. Par la suite, la relation de travail a été terminée dans le cadre d’un accord de règlement comprenant une clause globale de renonciation aux réclamations, avant que la demande d’information ne soit satisfaite. L’autorité de contrôle data protection a clos l’affaire arguant que le droit à information ne subsistait plus une fois l’accord signé. Le salarié a saisi la juridiction administrative. 

Résumé des faits

  • Le salarié avait demandé à l’employeur, en vertu de l’art. 15 RGPD, de lui communiquer toutes les informations concernant les traitements de ses données personnelles. 

  • L’employeur n’a pas répondu à cette demande. 

  • La relation de travail a ensuite pris fin pour raisons opérationnelles. Puis un accord de règlement a été conclu entre l’employeur et le salarié. 

  • L’accord incluait une clause de « règlement global » stipulant que toutes les réclamations issues de la relation de travail et de sa rupture, connues ou non, seraient réglées, à l’exception des documents de travail. 

  • Le contrôle de protection des données a estimé que, du fait de cet accord, le droit à l’information du salarié était éteint et a clos les poursuites contre l’employeur. 

  • La juridiction administrative (« Higher Administrative Court of Saarlouis ») a confirmé que le droit à l’information de l’art. 15 RGPD peut être valablement renoncé dans un accord de rupture une fois le contrat de travail terminé. 

  • L’article note qu’il s’agit de la première fois qu’une juridiction supérieure tranche explicitement sur la renonciation au droit à information en vertu de l’art. 15 RGPD. 

Impact juridique
Cette décision a des implications concrètes et importantes en matière de protection des données : elle confirme qu’un salarié — ou plus généralement une personne concernée — peut, via un accord de rupture ou règlement à l’amiable, renoncer à son droit à l’information prévu à l’art. 15 RGPD, du moins pour des périodes écoulées. Pour les employeurs et organisations, cela ouvre la possibilité d’intégrer dans leurs accords de fin de contrat une clause spécifique précisant que le droit à information a été satisfait ou renoncé, afin de limiter les risques liés à des demandes tardives ou contestations de données personnelles non communiquées. Cependant, cette renonciation ne dispense pas l’employeur de son obligation de conformité pour les traitements futurs ou en cours. Il convient également d’être vigilants : la validité d’une telle renonciation dépendra du contexte, de la négociation, de la transparence et de l’équilibre entre les parties, ce qui pourrait faire l’objet de contestations selon les juridictions.

Lien vers l'article : Lexology

Article 6 - L’inopérance du droit commun pour la qualification du contrat à distance (Cass, 1ère civ., 5 nov. 2025, n°23-22.883)

La Cour de cassation examine comment un contrat conclu avec un consommateur par moyens à distance doit être qualifié de « contrat à distance » au sens de l’art. L. 221-1 du Code de la consommation, et juge que les modalités matérielles de remise de l’offre ou de transmission de l’acceptation sont sans incidence sur cette qualification. 

Contexte
La décision fait suite à un litige entre une cliente, Mme V, et la société SAS Seiel Groupe Capitole (ex-Institut européen de langues) : Mme V avait souscrit une inscription à une formation après avoir reçu par courriel une brochure et un dossier d’inscription, puis signé à son domicile, et exercé un droit de rétractation. La société refusait le remboursement. La cour d’appel de Toulouse l’a condamnée au remboursement. La société se pourvoit en cassation. 

Résumé des faits

  • Le 14 septembre 2020, la société a adressé à Mme V, par courriel, une brochure de présentation et un dossier d’inscription pour une formation à distance. 

  • Le 15 septembre 2020, Mme V a signé le dossier d’inscription à son domicile et l’a remis dans les locaux de la société le 16 septembre.

  • Mme V a exercé son droit de rétractation par courrier recommandé le 22 septembre 2020, dans un délai de quatorze jours à compter de sa signature, tel que prévu dans les conditions générales.

  • La cour d’appel a jugé que le contrat constituait un « contrat à distance » au sens de l’art. L. 221-1 C. consommation et que la rétractation était valablement exercée. 

  • En cassation, la société contestait la qualification du contrat à distance en soutenant que l’acceptation n’était pas intervenue par voie exclusivement à distance, ou que la signature à domicile impliquait un autre régime. 

  • La Cour de cassation rejette le pourvoi, considérant que :

    • la qualification de « contrat à distance » ne dépend pas de l’absence de remise physique du dossier dans les locaux du professionnel après signature, mais de la conclusion du contrat par recours à un système organisé de vente ou prestation à distance. 

    • les dispositions de l’art. 1121 C. civ. (contrat conclu dès que l’acceptation parvient à l’offrant) ne remettent pas en cause le point de départ du délai de rétractation prévu par l’art. L. 221-18 C. consommation. 

Impact juridique
Cet arrêt clarifie que, en droit français, la qualification de « contrat à distance » ne dépend pas de la manière matérielle dont l’acceptation est remise ou transmise après la signature chez le consommateur : ce qui importe est que le professionnel ait mis en place un système organisé de vente ou prestation à distance et que l’échange de consentement ait pu s’opérer via des moyens de communication à distance. L’arrêt confirme ainsi que le délai de rétractation court dès la signature de l’acceptation par le consommateur, même si la signature est remise physiquement dans les locaux du professionnel. Pour les professionnels : cet arrêt souligne l’importance d’analyser la chaîne de conclusion des contrats (brochure, dossier, acceptation, signature à domicile) afin de déterminer la correcte application des dispositions sur la vente à distance et le droit de rétractation. Pour les consommateurs : il renforce la protection liée au droit de rétractation dans les contrats conclus à distance, même si une partie du processus physique intervient après la signature à domicile.

Lien vers l'article : Légifrance

Haas Avocats

Auteur Haas Avocats

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