Par Haas Avocats
Suivis par des milliers voire millions d’abonnés sur les réseaux sociaux, les influenceurs partagent au quotidien de nouveaux produits ou services dont ils vantent les mérites.Les marques n’hésitent ainsi pas à faire appel à eux pour augmenter leur visibilité.
Beaucoup d’entre eux ignorent pourtant différentes règlementations, et exposent leurs auditeurs à un ensemble de risques, pouvant par exemple être d’ordre financier, avec les arnaques d’investissements ou les jeux d’argent, ou encore d’ordre sanitaire, avec la promotion de produits de santé ne disposant pas de label de qualité voire d’autorisation de mise sur le marché.
Il en découle une véritable nécessité de créer un cadre juridique efficient encadrant les activités commerciales des influenceurs.
De par les conseils et les recommandations qu’ils délivrent à des milliers d’internautes – comprenant une majorité de jeunes - ces influenceurs ont une responsabilité particulière dont ils doivent prendre conscience.
A l’heure actuelle, un ensemble d’obligations leur sont déjà imposées. Ils doivent notamment :
Toutefois, ces obligations apparaissent aujourd’hui insuffisantes, et très souvent non respectées.
De récentes affaires mettent en exergue l’ignorance d’un grand nombre d’influenceurs quant à leurs obligations.
Le 23 janvier dernier, pour la première fois, une action collective a été engagée contre un couple d’influenceurs, Marc et Nadé Blata. Deux plaintes collectives réunissant 88 plaintes conjointes ont été déposées auprès de la Procureure de Paris, au nom du collectif AVIS (Aide aux Victimes d’Influenceurs), notamment pour escroquerie et abus de confiance.
Deux affaires sont en cause :
La première concerne un projet de vente en NFT intitulé « Animmon », vantée par l’influenceur Marc Blata. Sur cette plateforme, les créateurs de ces NFT ont promis des récompenses colossales aux premiers investisseurs, lesquelles ne leur ont jamais été délivrées. Le préjudice total de l’affaire est estimé à plus de 6 millions de dollars.
La seconde concerne une activité de copy-trading promue par Marc et Nadé Blata sur les réseaux sociaux.
En réponse, Meta – maison mère de Facebook et Instagram – avait annoncé la suppression du compte Instagram de Marc et Nadé Blata.
Selon la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF), 60% des influenceurs et créateurs de contenus en ligne ne respectent par la réglementation sur la publicité et les droits des consommateurs.
Ce constat accentue la nécessité d’instaurer un cadre législatif efficient.
Bruno Le maire, ministre de l’Economie, des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique, a mis en ligne une consultation publique le 8 janvier 2023, ouverte jusqu’au 31 janvier, relative aux activités commerciales des influenceurs.
Inscrite dans une démarche de co-construction, cette consultation avait vocation à engager la réflexion autour de la définition et de l’encadrement juridique de ces nouveaux métiers aux nombreux enjeux.
La consultation a permis, à ceux qui le souhaitaient, de donner leur avis autour de onze mesures, réparties en quatre thèmes, à savoir :
Les droits et les obligations des influenceurs ;
La propriété intellectuelle dont beaucoup d’influenceurs méconnaissent les règles ;
La protection des consommateurs;
La gouvernance du secteur (ex : création d’un label).
Le 30 mars 2023, l’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité en première lecture la proposition de loi visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux.
Plus précisément, cette proposition vise à répondre à deux objectifs :
Il appartient désormais au Sénat d’examiner cette proposition de loi.
Au niveau européen, le Digital Service Act (DSA) est entré en application le 16 novembre 2022 et contribue à l’encadrement juridique de l’activité des influenceurs et éditeurs de contenus.
Son article 26 prévoit notamment que les plateformes en ligne doivent mettre à disposition « une fonctionnalité leur permettant de déclarer si le contenu qu’ils fournissent constitue une communication commerciale ou s’il contient une telle communication ».
Les utilisateurs finaux doivent pouvoir « se rendre compte de manière claire, non ambiguë et en temps réel, y compris au moyen de marquages bien visibles […] que le contenu fourni par le destinataire du service » est une publication sponsorisée.
Une fois ce nouveau cadre juridique posé, il appartiendra aux influenceurs de prendre conscience de leur responsabilité juridique et des obligations qui leur incombent.
Pour plus de pédagogie, l’Etat devrait mettre à disposition des influenceurs l’ensemble des informations relatives à leurs droits et devoirs dans le cadre de leur activité.
En parallèle, et en dépit de la création de l’Union des Métiers de l’Influence et des Créateurs de Contenu (UMICC) en janvier 2023, Magali Berdah – agent d’influenceurs – a depuis fait part de sa volonté de créer une Fédération des influenceurs et des créateurs de contenus (FICC) qui aurait vocation à mieux les former.
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[1] La proposition de loi entend ainsi définir les influenceurs comme les personnes « qui mobilisent leur notoriété auprès de leur audience" pour communiquer en ligne des contenus faisant la promotion "directement ou indirectement de biens, de services ou d’une cause quelconque, en contrepartie d’un bénéfice économique ou d’un avantage en nature ».