Par Gérard Haas et Eléonore Hakim
En ce début d’année 2022, Google se retrouve à nouveau devant le Conseil d’Etat.
Le géant du numérique souhaite obtenir l’annulation d’une amende de 100 millions d’euros qui lui avait été infligée par la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) le 7 décembre 2020.[1]
Le rapporteur public du Conseil d’Etat a demandé le rejet de la requête.
Le 7 décembre 2020, la formation restreinte de la CNIL a prononcé à l’encontre des sociétés GOOGLE LLC et GOOGLE IRELAND LIMITED des sanctions de 60 millions et 40 millions d’euros pour non-respect de la législation sur les cookies et autres traceurs.
Suite à un contrôle effectué en mars 2020 sur le site google.fr, la CNIL a constaté que le site n’était pas conforme à l’article 82 de la Loi Informatique et Libertés :
La CNIL considère que le montant des amendes est justifié par la portée du moteur de recherche Google Search en France, par le nombre de personnes concernées (50 millions d’utilisateurs) ainsi que par l’importance des bénéfices que les sociétés GOOGLE LLC et GOOGLE IRELAND LIMITED tirent des revenus publicitaires indirectement générés à partir des données collectées par les cookies à finalité publicitaire.
En complément des amendes administratives, les sociétés avaient jusqu’au 7 mars 2021 pour se mettre en conformité avec la législation sur les cookies, sous peine d’une astreinte de 100 000 euros par jour de retard.
L’injonction a été contestée par les sociétés. En vertu de l’article L.521-1 du Code de justice administrative, elles ont demandé au Conseil d’Etat de suspendre l’injonction sous astreinte prononcée par la CNIL. Cependant, par une décision du 4 mars 2021, le juge des référés du Conseil d’Etat a rejeté la requête et a validé l’injonction faite à Google.[2]
L’injonction a désormais été clôturée par la CNIL, les sociétés s’étant mises en conformité dans le délai imparti.
Toutefois, il semblerait que Google n’ait pas dit son dernier mot.
Le 12 janvier 2022, Google a plaidé devant le Conseil d’Etat afin d’obtenir l’annulation de l’amende qui lui avait été infligée en décembre 2020.
Google estime que la CNIL n’était pas compétente pour contrôler et sanctionner les traceurs déposés. Les sociétés considèrent que le mécanisme de guichet unique, prévu à l’article 56 du RGPD, aurait dû s’appliquer.
Pour rappel, en application de ce mécanisme, l’autorité de contrôle compétente ne serait pas la CNIL mais l’autorité irlandaise de protection des données, la Data Protection Commissionner (DPC), qui aurait dû agir en qualité d’autorité chef de file.
De son côté, la CNIL estime qu’elle est matériellement compétente pour contrôler et sanctionner les opérations liées aux cookies déposés par les sociétés sur les terminaux des internautes situés en France.
Elle souligne que le mécanisme de coopération n’avait pas vocation à s’appliquer, dans la mesure ou les opérations liées à l’utilisation des cookies relèvent de la directive « e Privacy », transposée à l’article 82 de la loi Informatique et Libertés.
Dans ses conclusions, le rapporteur public du Conseil d’Etat n’a pas fait droit à la demande de Google et réaffirme la compétence matérielle de la CNIL.
Les juges suivront-ils l’avis du rapporteur public ? La décision finale est attendue d’ici deux semaines.
Affaire à suivre..
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[1] Délibération n°SAN-2020-012 du 7 décembre 2020 concernant les sociétés GOOGLE LLC et GOOGLE IRELAND LIMITED.
[2] Conseil d’Etat, 4 mars 2021, n°449212