Comment identifier des clauses abusives dans les CGV ?

Comment identifier des clauses abusives dans les CGV ?
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Par Charlotte Paillet et Théophile Tsimaratos 

La protection accrue des consommateurs mène souvent les juridictions à reconnaître comme abusives certaines clauses contenues dans des conditions générales de vente.

Ce caractère abusif doit néanmoins être démontré afin d’éviter l’excès inverse à savoir une annulation systématique de contrats conclus par les consommateurs.

Le Tribunal judiciaire de Paris, dans un jugement en date du 28 juin 2022, a eu l’occasion de revenir sur l’interprétation de ce caractère abusif dans le cadre d’une action menée par l’association UFC-Que-Choisir à l’encontre de Blablabus.

Rappel sur la définition d’une clause abusive en droit de la consommation

Le Code de la consommation définit une clause abusive comme celle visant à créer un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat, au détriment de la partie faible, à savoir le non-professionnel ou le consommateur[1].

Ce déséquilibre significatif traduit une atteinte grave à l’équilibre du contrat comme :

  • la restriction de l’obligation du professionnel quant au respect de ses engagements vis-à-vis de son cocontractant,
  • la possibilité de modifier unilatéralement les clauses du contrat relative à sa durée ou son prix
  • la suppression du droit à la réparation du préjudice subi en cas de manquement par le professionnel à l’une de ses obligations,
  • l’impossibilité pour le non-professionnel ou le consommateur de solliciter la résiliation du contrat en cas de manquement du professionnel à l’une de ses obligations de délivrance ou de garantie d’un bien.

L’ensemble de ces clauses considérées comme naturellement abusives est recensé par la Commission des clauses abusives, instituée par le Code de la consommation.

Ces clauses sont d’autant plus graves lorsqu’elles sont contenues dans un contrat d’adhésion, c’est-à-dire un contrat dont les dispositions ne sont pas négociables et sont déterminées à l’avance par l’une des parties[2], comme c’est par exemple le cas des conditions générales de ventes.

C’est sur cette base que l’Association UFC-Que-Choisir affirmait que l’acceptation des Conditions générales de Vente de Blablabus faisait naître un déséquilibre significatif pour le consommateur dans la relation contractuelle entre les parties.

Le rejet de la qualification du caractère abusif des clauses contractuelles de Blablabus

Pour juger du caractère abusif ou non des conditions générales de vente de BlaBlabus, le tribunal judiciaire de Paris analysait dans le détail plusieurs clauses à l’aune des articles L. 212-1 et R. 212-2 du code de la consommation pour juger que :

  • la reproduction partielle de l’article 1218 du Code civil dans la clause dédiée à la force majeure n’était pas de nature à limiter indument la responsabilité de Blablabus dans la mesure où le consommateur pouvait librement aller consulter l’intégralité de l’article par lui-même ;
  • l’envoi des conditions générales de vente par email à l’adresse électronique du consommateur suffisait à caractériser la communication conforme des documents contractuels qui lui sont opposables ;
  • contrairement à l’interprétation de l’UFC-Que-Choisir, la clause relative à l’annulation de la commande n’avait pas pour effet de faire supporter au client les conditions contractuelles d’annulation en cas de force majeure,
  • le droit de rétractation porte nécessairement aussi bien sur le service principal que sur les prestations et services accessoires de sorte que les dispositions de la clause relative à l’exercice de ce droit n’était pas abusive,
  • il n’est pas déraisonnable d’imposer aux consommateurs un délai avant de se présenter à l’embarquement dans la mesure où une telle obligation est de nature à laisser un temps nécessaire pour effectuer le contrôle des titres de transports, le chargement des bagages, l’installation des passagers tout en assurant le respect de l’horaire de départ.

Ainsi, par une motivation clause par clause, le Tribunal Judiciaire de Paris a pu réfuter l’interprétation de l’UFC-Que-Choisir au profit de Blablabus.

L'importance de la rédaction des CGV par des professionnels 

Le secteur du transport dans lequel s’inscrit Blablabus voit fleurir un grand nombre de nouveaux opérateurs économiques depuis la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 dite loi « Macron » libéralisant le secteur du transport en autocars.

Si certains acteurs commettent des dérives dans leur mise en conformité avec les dispositions du Code de la Consommation, une appréciation trop large du caractère abusif des clauses contenues dans les conditions générales peut avoir pour effet l’excès inverse et pénaliser les acteurs professionnels.

La décision du Tribunal Judiciaire de Paris est alors bienvenue en ce qu’elle permet de rassurer le marché encore juvénile du transport libéral de passagers par autocars. Ce jugement permet également si besoin était, de démontrer l’importance capitale que revêt la rédaction des conditions générales de vente pour les biens et services offerts aux consommateurs.

Un soin particulier doit en effet être attaché à la rédaction de ce cadre contractuel essentiel et s’entourer de professionnels expérimentés qui sauront les rédiger de façon à prémunir les acteurs professionnels contre d’éventuelles attaques juridiques sur le fond.

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[1] Article L212-1 du Code de la consommation

[2] Article 1110 alinéa 2 du Code civil

Gérard HAAS

Auteur Gérard HAAS

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