Par Kate Jarrard et Gaspard de Laubier
L’intérêt des clauses de confidentialité et des clauses de non-concurrence n’est plus à démontrer lorsqu’il s’agit de protéger son activité dans le cadre d’une relation commerciale.
Néanmoins, dans un arrêt récent du 4 mars 2020, la chambre commerciale de la Cour de cassation a apporté des précisions quant à leur validité.
Une société A qui élabore et distribue des plats cuisinés sans allergène a sous-traité la fabrication de ces derniers à une société B. Un contrat est rédigé afin d’encadrer cette fabrication, incluant notamment une clause de confidentialité, afin d’éviter que la société B ne divulgue le savoir-faire de la société A, et une clause de non-concurrence destinée à empêcher la société B de concurrencer la société A sur le même marché.
Cependant, la société B cède une partie de son capital à une société C spécialisée dans l’élaboration et la distribution de plats cuisinés, avec la volonté de développer une gamme de produits sans allergène. Cette société étant sur le même segment de marché que la société A, la société B rompt son contrat avec la société A.
Considérant que la société B avait transmis son savoir-faire à la société C, laquelle souhaitait développer une nouvelle gamme de produits, la société A a assigné les sociétés B et C en violation des clauses de non-concurrence et de confidentialité.
L’affaire a fait son chemin jusqu’à la Cour de cassation qui a constaté la violation de la clause de confidentialité par la société B, mais la nullité de la clause de non-concurrence.
Il s’agit donc de s’interroger sur les conditions à réunir afin de garantir à ces clauses une complète efficacité.
La clause ou l’accord de confidentialité (clause de non-divulgation, ou NDA) interdit la divulgation d'une information en imposant au débiteur un « devoir de se taire »[1] : il ne doit pas divulguer les informations qui lui sont communiquées, qu’elles soient techniques, financières ou commerciales.
En l’espèce, la clause avait pour but de protéger le savoir-faire de la société A en interdisant à son sous-traitant de divulguer les informations fournies quant à l’élaboration de ses recettes.
La Cour de cassation a considéré que la société B avait nécessairement divulgué le savoir-faire qu’elle détenait à la société C afin de lui permettre de créer une telle gamme de produits sans allergène. En effet, la société C ne commercialisait pas cette gamme de plats cuisinés avant la prise de participation.
La clause de confidentialité s’avère donc ici pleinement efficace, quand bien même il en a été décidé autrement s’agissant de la clause de non-concurrence.
La clause de non-concurrence est insérée dans les contrats commerciaux afin de limiter la liberté d’exercice par une partie, d’une activité équivalente à celle de son cocontractant, notamment en raison des connaissances acquises au cours de leur relation. Cette forte restriction à la liberté d’entreprendre exige donc des conditions de validité précises.
Deux conditions principales, analysées en l’espèce, doivent être réunies :
Or ici, aucune limite expresse dans l’espace n’avait été clairement indiquée par les parties, rendant cette clause de non-concurrence nulle. Et pour cause, la disposition faisait uniquement référence aux activités de fabrication et de commercialisation de la société B, sans définir précisément leur cadre géographique.
Cet arrêt rappelle que la rédaction des clauses de confidentialité et de non-concurrence dans le cadre d’une relation commerciale nécessite une attention particulière afin de protéger son savoir-faire et son activité. Maladroitement formulées, ces clauses se trouvent privées d’effet résultant en d’importantes conséquences financières pour la société lésée.
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[1] M. Vivant, Les clauses de secret, Les principales clauses conclues par les professionnels, Colloque de l'IDA, PUAM, 1991, p. 101