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Agrément et déremboursement partiel : quel régime pour la téléconsultation ?

Rédigé par Anne-Charlotte Andrieux | Oct 31, 2022 3:45:06 PM

Anne-Charlotte Andrieux et Romain Delangle

Depuis plusieurs années, la télémédecine est venue proposer une réponse aux enjeux qui pèsent sur notre système de santé constituant une arme précieuse pour contrebalancer la désertification médicale, améliorer la prévention ou faciliter le suivi des patients. 

A la faveur de la période de crise sanitaire, des mesures de bon sens ont été adoptées pour favoriser le déploiement de la téléconsultation et lutter contre la pandémie.

Le récent essor des consultations à distance a toutefois conduit le Conseil national de l’ordre des médecins à alerter sur les risques de mésusages laissant craindre une atteinte à la déontologie médicale ou au bon fonctionnement du parcours de soin. Face à ces nouveaux enjeux, le législateur a initié un encadrement renforcé du secteur dans un souci d’équilibre entre le déploiement d’usages innovants au service des patients et les impératifs de sécurité, de confidentialité et de protection des données de santé.

Un récent projet d’amendement au PLFSS, proposé en commission des affaires sociales, est également venu relancer les débats autour du régime de la téléconsultation. L’amendement prévoirait que « les actes de téléconsultation doivent être réalisés par le biais d’une maison de santé pluridisciplinaire, d’une officine ou d’une collectivité […]. ». Autant de conditions vivement contestées par les professionnels de santé et qui sonneraient le glas de la téléconsultation telle que les Français ont pu l’expérimenter pendant le COVID-19.

L’occasion d’un retour sur les règles et actualités applicables au secteur.

Télésanté, télémédecine, téléconsultation… de quoi parle-t-on ?

Si ces mots partagent le même préfixe, ils ne revêtent pour autant pas la même signification. Aussi est-il fondamental de bien cerner ces notions pour comprendre le régime juridique qui leur est attribué.

Le code de la santé publique identifie une catégorie générale, la « télésanté », laquelle se subdivise en deux branches :

  • D’une part, la télémédecine: il s’agit d’une forme de pratique médicale à distance qui met en relation le patient avec des professionnels de santé, ainsi que des professionnels de santé entre eux. Au sein de la télémédecine, plusieurs actes médicaux sont identifiés :

  • La téléconsultation qui permet à un professionnel médical de donner une consultation à distance à un patient ;

  • La téléexpertise, qui permet à un professionnel de santé de solliciter à distance l'avis d'un ou de plusieurs professionnels médicaux ;

  • La téléassistance médicale, qui a pour objet de permettre à un professionnel médical d'assister à distance un autre professionnel de santé au cours de la réalisation d'un acte ;

  • D’autre part le télésoin: à la différence de la télémédecine, le télésoin met en relation à distance le patient avec des pharmaciens et des auxiliaires médicaux.

Remboursement des téléconsultations : fin de la prise en charge à 100%

S’agissant des téléconsultations, ces actes sont pris en charge par l’Assurance Maladie sous réserve du respect de certaines conditions précisées au sein de la Charte des bonnes pratiques publiée par l’Assurance Maladie au printemps 2022.

A ce titre, la téléconsultation doit :

  • S’inscrire dans le respect du parcours de soin coordonné centralisé par le médecin traitant ;

  • Être réalisée en alternance avec des consultations en présentiel ;

  • Être réalisée par un médecin téléconsultant se situant à proximité du domicile du patient ;

A l’instar des consultations traditionnelles, les téléconsultations réalisées auprès d’un médecin généraliste ou d’un spécialiste, dans le respect du parcours de soin coordonné, font l’objet d’un remboursement par l’assurance maladie. Un médecin ne peut toutefois réaliser plus de 20% de son volume d’activité à distance sur une année civile.

Toutefois, l’Assurance maladie a officiellement mis fin au remboursement dérogatoire des téléconsultations depuis le 30 septembre 2022 revenant ainsi sur le décret du 9 mars 2020 lequel avait instauré une prise en charge forfaitaire de la télésurveillance en période de pandémie, reconduite jusqu’alors. Les téléconsultations feront désormais l’objet d’une prise en charge à hauteur de 70%, sauf situation particulière.

Vers un agrément des sociétés de téléconsultation

En parallèle, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PFLSS) pour 2023 prévoit la mise en place prochaine d’un agrément pour les sociétés commerciales proposant de la téléconsultation.

Le projet de loi de finance vient ainsi modifier le code de la santé publique et prévoit que cet agrément soit délivré par les ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé afin de permettre aux sociétés de téléconsultation de facturer à l’Assurance maladie les actes de téléconsultation des médecins qu’elles salarient.

La délivrance de l’agrément sera soumise aux conditions suivantes :

  • Seules pourront recevoir l’agrément les sociétés commerciales régies par le code de commerce proposant, à titre exclusif ou non, une offre médicale de téléconsultation ;

  • Les sociétés bénéficiaires de l’agrément ne peuvent être sous le contrôle d’une personne physique ou morale exerçant une activité de fournisseur, de distributeur ou de fabricant de médicaments, de dispositifs médicaux ou de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, à l’exception des dispositifs permettant la réalisation d’un acte de téléconsultation ;

  • Les outils et services numériques déployés par la société doivent respecter les règles relatives à la protection des données personnelles ainsi que les référentiels d’interopérabilité et de sécurité édictés par l’Agence du numérique en Santé (ANS).

  • Lorsque plusieurs médecins exercent leur activité dans une même société de téléconsultation agréée, celle‑ci doit les réunir régulièrement en un comité médical chargé de donner son avis sur la politique médicale de la société et la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins.

  • La société agréée devra par ailleurs élaborer, et transmettre au conseil départemental de l’ordre des médecins, un rapport d’activité annuel intégrant un programme d’actions visant à garantir le respect des obligations qui s’imposent à elle, assorti d’indicateurs de suivi.

L’ensemble de ces conditions devront être prises en considération par les sociétés de téléconsultation à l’horizon du 31 décembre 2023 et donneront lieu à une évaluation continue. Dès lors, si les conditions prévues pour la délivrance ou le renouvellement de l’agrément cessent d’être réunies, les ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé peuvent le suspendre ou y mettre un terme.

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