Par Paul Benelli et Alexandre Lobry
Considérés par beaucoup comme des stimulants essentiels pour le commerce électronique, les plateformes en ligne (ou Marketplaces) sont plébiscitées par les entreprises. Aujourd’hui, on estime qu’environ un million d’entreprises de l’Union européenne passent par ces plateformes en ligne pour atteindre leurs clients. En 2021, 33% des ventes en lignes pourraient se réaliser via des marketplaces.
Le législateur l’a bien compris et a, cette année encore, renforcé les obligations légales qui leur incombent.
Depuis 2016, les marketplaces et les plateformes collaboratives sont soumises à trois grands principes : LOYAUTE, CLARTE et TRANSPARENCE.
L’année 2018 a été marquée par un renforcement drastique du cadre juridique des marketplaces et des plateformes collaboratives. En effet, plusieurs décrets sont venus compléter les obligations de transparence et de loyauté que doivent respecter les marketplaces en encadrant notamment leurs obligations d’information, les bonnes pratiques à adopter et leurs obligations fiscales.
L’année 2019 sera elle marquée par :
« Nous allons chercher l’argent là où il se trouve » a martelé Bruno Le Maire, Ministre de l’Economie en référence à la mise en place future d’une taxe européenne sur les acteurs majeurs du numérique, tels que les GAFA.
Cette phrase, adressée aux parlementaires européens, s’applique aussi en France, où on constate depuis plusieurs années que l’administration fiscale cherche à responsabiliser les opérateurs de plateformes numériques.
Les prémices - Fin 2015 : Suite à la saga Uber et Heetch grâce auxquelles de nombreux chauffeurs non-professionnels ont pu échapper à l’administration fiscale, la loi de finances pour l’année 2016 a d’abord obligé les opérateurs de plateformes à :
Le renforcement des obligations fiscales des plateformes - l’année 2017 : Dans un deuxième temps, la Loi pour une République numérique a renforcé ces obligations en obligeant l’opérateur de plateformes en ligne à informer l’utilisateur sur les droits et obligations en matière fiscale des utilisateurs.
L’obligation de déclaration fiscale des opérateurs de plateformes, - La petite révolution de 2019 : Finalement, les pouvoirs publics ont décidé de carrément faire porter aux opérateurs l’obligation de réaliser la déclaration fiscale de leurs utilisateurs réalisant un chiffre d’affaires important par leur intermédiaire.
Ainsi, la loi n°2018-898 du 23 octobre 2018 relative à « la lutte contre la fraude » a accentué les obligations fiscales des opérateurs de plateformes en ligne. L’arrêté du 27 décembre 2018 est même venu préciser qu’à compter du 1er juillet 2019 :
Cette obligation est bien entendu assortie d’exceptions pour les ventes entre particuliers, l’économie collaborative ou les utilisateurs générant moins de 3.000 euros de revenus ou réalisant moins de 20 transactions annuelles.
Ainsi, 2019 marquera la naissance d’une obligation de déclaration fiscale supplémentaire pour les opérateurs de plateformes en ligne.
Le business model des marketplaces de services repose historiquement sur un contournement des règles du droit du travail, s’appuyant notamment sur le fait que l’autoentrepreneur prestataire de service est un « indépendant ».
Il semblerait que l’année 2019 sonne le glas de ce type de modèle puisque la jurisprudence a, coup sur coup, prononcé des jugements en faveur de la requalification des contrats entre Marketplaces et travailleurs indépendants en contrat de travail.
La requalification du contrat entre un professionnel indépendant et un opérateur de plateforme en ligne en contrat de travail entraîne pour ce dernier le paiement d’importantes indemnités et le paiement rétroactif des cotisations et contributions sociales liées à l’emploi d’une personne salariée.
L’opérateur d’une plateforme dédiée à la vente de prestations de services (VTC, Foodtech, prestations de bien-être) devra donc être particulièrement vigilant en 2019 et exclure de son contrat le liant aux prestataires référencés sur sa plateforme, tout lien de subordination.
Il se pourrait donc que 2019 soit le théâtre d’un important mouvement de responsabilisation sociale des plateformes en ligne, qui pourraient devoir composer avec un large mouvement de requalifications de contrats de « partenariat » en contrats de travail.
L’article D.111-15 du Code de la consommation impose depuis le 1er janvier 2019 aux opérateurs de plateformes en ligne (BtoC et CtoC) d’élaborer et de diffuser auprès des consommateurs des bonnes pratiques visant à renforcer les obligations de clarté, de transparence et de loyauté.
Ainsi un opérateur de plateforme en ligne dont le nombre de connexions dépassera 5 millions de visiteurs mensuels disposera d'un délai de 6 mois pour élaborer un document (livre blanc, charte, etc.) renforçant ses obligations de clarté, loyauté et transparence à l’égard de ses clients consommateurs (pour plus d’informations, voir notre article sur le sujet : (https://www.haas-avocats.com/ecommerce/marketplaces-plateformes-collaboratives-nouveau-cadre-juridique-pour-2018/).
Le 26 avril 2018, la Commission Européenne a publié son projet de règlement européen relatif à l’équité et la transparence sur les plateformes de vente en ligne à destination des professionnels.
Ce règlement impose une politique européenne vis-à-vis des utilisateurs professionnels des services d'intermédiation en ligne et des moteurs de recherche. Cette réglementation visera à encadrer les relations entre les services d'intermédiation en ligne et leurs utilisateurs professionnels, mais également entre les moteurs de recherche et les sites Web de leurs utilisateurs professionnels.
Ainsi le règlement, dont la date d’entrée en vigueur n’a pas encore été précisée, imposera aux opérateurs de plateforme en ligne et aux moteurs de recherche, un certain nombre d’obligations (notification de changement des CGV, raison de suppression d’une offre, transparence sur le référencement des offres, modalités d’accès aux données, choix d’un médiateur, codes de bonne conduite).
Ces obligations s’imposeront dès lors que l’opérateur de la plateforme BtoB :
L’entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données (RGPD) en date du 25 mai 2018 a totalement bouleversé les pratiques des entreprises en matière de traitement des données personnelles.
Le RGPD a un impact tout particulier sur les opérateurs de marketplaces et autres plateformes en ligne dans la mesure où ces derniers sont considérés comme des « Fournisseurs de services numériques ».
Ainsi, l’obligation de mise en conformité RGPD obligatoire pour les opérateurs de plateformes (détaillée dans notre Livre blanc « Marketplaces & RGPD disponible ici : http://info.haas-avocats.com/livre-blanc-rgpd-markteplaces) sera d’autant plus forte en 2019 dans la mesure où :
Depuis l’été 2018, la DGCCRF a accentué ses contrôles afin de mieux protéger les consommateurs.
L’année 2019 pourrait donc être synonyme d’un accroissement des contrôles (et sanctions) à l’égard des places de marché numériques.
L’exemple le plus significatif est la transmission par la DGCCRF au Procureur de la République des conclusions de ses investigations concernant le site vente-privée.com auprès de l’autorité judicaire, lesquelles feraient apparaître d’éventuelles annonces de prix trompeuses : https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/dgccrf/presse/communique/2019/cp-venteprivee-100119.pdf.
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