Par un arrêt du 12 septembre 2018, la Première Chambre civile de la Cour de cassation a redéfini le cadre du droit de rétractation, lorsque le contrat est conclu entre professionnels.
En l’espèce, Mme X., architecte d’intérieur, a souscrit le 17 juillet 2014 auprès de la société Cométik un contrat de création et de licence d’exploitation d’un site internet dédié à son activité professionnelle, ainsi que d’autres prestations externes.
Le 2 septembre suivant, elle demande sa rétractation du contrat, ce que conteste la société Cométik, qui l’assigne en paiement.
La Cour d’appel de Douai, dans son arrêt en date du 23 mai 2017, a prononcé l’anéantissement des effets du contrat, et condamné la société Cométik à rembourser les sommes versées par Mme X au titre de son exécution.
Le requérant se fonde, pour contester cette décision, sur le fait que le contrat entre dans le cadre de l’activité principale du professionnel, en ce qu’il participe à la satisfaction des besoins de celle-ci, pour écarter l’application du droit de rétractation. Il estime, ainsi, que la Cour d’appel a violé l’article L.121-16-1 du Code de la consommation.
Celui-ci dispose en son III « Les sous-sections 2, 3, 6, 7 et 8, applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq. »
Aux termes de cet article, le professionnel employant moins de cinq salariés et qui souscrit, hors établissement, un contrat dont l’objet n’entre pas dans le champ de son activité professionnelle, bénéficie des mêmes dispositions protectrices que le consommateur.
La question qui se posait donc ici était celle de l’applicabilité au contrat signé entre deux professionnels des dispositions du Code de la consommation. En d’autres termes, quelle est la précision apportée par la Cour de cassation sur la définition du champ d’activité principal du professionnel ?
Le requérant soutenait, pour écarter l’application des dispositions du Code de la consommation, que les prestations visées au contrat et souhaitées par Mme X., servaient à ses besoins professionnels. Selon lui, le critère déterminant était celui de l’utilité des prestations commandées pour l’exercice de l’activité principale du professionnel.
Cependant, la Cour d’appel ainsi que la Cour de cassation ont adopté une autre définition que celle promue par la société prestataire. Elles ont ainsi considéré que s’il est certain qu’un système de communication visant à porter à la connaissance du public une activité a un rapport direct avec cette activité, il n’entre pas nécessairement dans le champ de cette activité qui ne se définit pas nécessairement par l’utilité d’un tel système pour la société.
En effet, elles s’attachent à la considération d’un autre critère, qu’est celui de la qualité du cocontractant. Elles ont ainsi estimé que « le simple fait que le service commandé serve l’activité professionnelle de la personne ne confère à celle-ci aucune qualité de nature à rééquilibrer les rapports contractuels alors que tel est le cas si ce service présente des caractéristiques propres conformes à celles de l’activité de cette personne, ou à tout le moins suffisamment proches ».
En d’autres termes, si la communication commerciale et la publicité via un site internet peuvent apparaître comme des outils importants de développement d’une société, il n’est pour autant pas partie intégrante du champ de compétence de tout professionnel.
Cette solution apparaît comme extrêmement novatrice au regard des décisions qui concernent les sociétés « one-shot ». Celles-ci se prévalent souvent de l’absence d’application des dispositions protectrices du code de la consommation pour échapper à une quelconque répression. Ici, la Cour de cassation vient protéger d’avantage les sociétés victimes de ces pratiques.
Cependant, il faut rester prudent sur l’opportunité d’une telle décision. Même si la jurisprudence a aujourd’hui trouvé les failles de ces relations contractuelles dangereuses, il est néanmoins important de se renseigner avant de signer ce type de contrat. Nous recommandons également aux entreprises de se faire assister de préférence par un expert du droit, afin d’éviter des procédures longues et couteuses. Depuis plusieurs années, le Cabinet HAAS Société d’Avocats a eu à plusieurs reprises l’occasion de prendre position pour sensibiliser les cibles des ventes « one shot » sur la recrudescence de contentieux destinés à sanctionner les déviances de cette pratique commerciale.
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