Par Gérard Haas, Claire Lefebvre et Magali Lorsin-Cadoret
Il y a quelques mois, nous faisions un bref état des lieux sur le cadre juridique applicable à la circulation des drones en France et dressions le constat d’une densification des règles applicables depuis l’entrée en vigueur du règlement européen délégué 2019/945 et du règlement européen d’exécution 2019/947.
Deux nouvelles ordonnances ont depuis été publiées, le 30 mars dernier :
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L’ordonnance n°2022-455 relative à la surveillance du marché et au contrôle des systèmes d’aéronef sans équipage à bord (UAS) destinés à être exploités selon les conditions applicables à la catégorie « ouverte » d’exploitation ;
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L’ordonnance n°2022-456 relative à la création d’un régime de déclaration dans le domaine de la sécurité aérienne.
Le présent article a pour objet de présenter les changements introduits par ces deux textes.
L’ordonnance n° 2022-455 : UAS sous surveillance
L’ordonnance n°2022-455 crée, au sein de la partie du Code des transports relative aux aéronefs, un chapitre consacré à la « surveillance du marché de certains aéronefs sans équipage à bord » et établit le dispositif permettant de mettre en œuvre les exigences européennes en matière de surveillance du marché des drones, et du contrôle des produits.
Objet de l’ordonnance
Les nouveaux articles créés par l’ordonnance visent les UAS destinés à être exploités selon les conditions applicables à la catégorie « ouverte » d’exploitation.
Rappel : La catégorie « ouverte » regroupe les opérations de loisirs ou professionnelles à risque faible.
Ils s’appliquent à des opérateurs économiques désignés, en charge de la conformité des produits :
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le fabricant s’il est établi dans l’Union Européenne ; ou
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l’importateur si le fabricant n’est pas établi dans l’Union Européenne ; ou
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un mandataire du fabricant ; ou
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si aucun des opérateurs précédents n’est établi dans l’Union Européenne, le prestataire de services d’exécution des commandes ;
mais aussi à des prestataires de services de la société de l’information (services prestés à distance, par voie électronique) ou aux organismes notifiés, en charge de l’évaluation de la conformité.
Désignation d’une autorité de surveillance et d’une autorité notifiante [1]
Le Code des transports se réfère désormais aux autorités administratives de l’Etat suivantes :
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Une autorité de surveillance des aéronefs, qui opère des contrôles appropriés et a la possibilité d’imposer des mesures coercitives aux opérateurs économiques, sous peine de sanctions ;
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Une autorité notifiante en charge de la mise en place et de l’application des procédures nécessaires à l’évaluation de la conformité ainsi qu’au contrôle des organismes notifiés.
Pouvoirs d’enquête des agents de l’autorité de surveillance[2]
Les agents de l’autorité de surveillance ont pour principale mission de rechercher et constater les manquements ou infractions aux exigences de conformité des aéronefs.
Ils disposent de larges pouvoirs d’enquête consistant, sans s’y limiter, à :
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Recueillir des renseignements auprès des opérateurs économiques ou prestataires de services concernés ;
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Réaliser des analyses et essais, y compris en vol, des aéronefs ; ou encore
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Procéder à des inspections inopinées sur place ou à des contrôles physiques des aéronefs.
Procédures, mesures et sanctions consécutives aux contrôles de conformité[3]
A la suite des contrôles, en cas de non-conformité, les agents doivent dresser et notifier le procès-verbal de la non-conformité à l’opérateur concerné.
La notification doit (i) inviter l’opérateur à présenter ses observations accompagnées de tout élément explicatif dans un délai raisonnable et (ii) l’informer des mesures et sanctions administratives encourues.
A l’issue du délai, l’autorité de surveillance peut prononcer des mesures et sanctions administratives à l’encontre des opérateurs, allant de l’avertissement à l’interdiction de mise sur le marché, voire à la destruction des produits, en passant par la mise en garde des utilisateurs finaux, en fonction de l’ampleur des risques et de la situation considérée.
En outre, des amendes administratives peuvent être imposées aux opérateurs, par exemple lorsque ceux-ci ne procèdent pas aux évaluations de conformité ou omettent de demander au fabricant de prendre des mesures correctives appropriées en cas de non-respect des normes.
Par exemple, le fait de ne pas se plier aux mesures imposées par les agents habilités est ainsi passible d’une amende dont le montant peut s’élever jusqu’à 100 000 euros, pouvant être assortie d’une astreinte d’un montant maximal de 10 000 euros.
Le code des transports prévoit également des sanctions pénales[4]si l’opérateur fait obstacle à l’exercice de leurs fonctions par les agents habilités (jusqu’à 10 000 euros d’amende et 6 mois d’emprisonnement) ou encore si les produits mis sur le marché présentent un risque grave pour la santé ou la sécurité (jusqu’à 50 000 euros d’amende et un an d’emprisonnement).
L’ordonnance n° 2022-456 : régime de déclaration dans le domaine de la sécurité aérienne
L’ordonnance n° 2022-456 relative à la création d’un régime de déclaration dans le domaine de la sécurité intérieure adapte les dispositions nationales (code des transports ; code de la consommation ; etc.) pour intégrer les évolutions de la réglementation européenne en matière de sécurité aérienne, tous types d’aéronefs confondus, par de nombreux renvois aux différents règlements européens pris en la matière.
Concernant les « aéronefs sans équipage à bord », comme le communiqué de presse du Conseil des ministres du 30 mars 2022 le relève, la compétence en matière de sécurité aérienne des drones a été transférée à l’Union Européenne par un règlement de 2018.
A ce titre, l’ordonnance :
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Harmonise les terminologies nationales avec les terminologies européennes ;
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Précise notamment :
- Les exceptions au régime d’immatriculation pour les drones dont la masse n’excède pas 25 kilogrammes et dont la conception n’est pas soumise à certification en application des règlements européens ;
- Les exceptions au régime d’enregistrement par voie électronique pour les drones de masse inférieure à 800 grammes ;
- Les obligations de formation des « télépilotes » - nouvelle notion intégrée au Code des transports et définie par renvoi à la réglementation européenne -, à l’exception des télépilotes de drones dont la masse est inférieure à 800 grammes ; ou encore
- Abroge des dispositions désormais couvertes par la réglementation européenne.
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[1] Articles L 6143-3 et L 6143-4 du Code des transports
[2] Articles L 6143-8 et suivants du Code des transports
[3] Articles L 6143-20 et suivants du Code des transports
[4] Articles L 6143-42 et suivants du Code des transports