Licenciement et vidéosurveillance : décision de la Cour de cassation

Licenciement et vidéosurveillance : décision de la Cour de cassation
⏱ Lecture 3 min

Par Haas Avocats

Le Règlement général sur la protection des données (RGPD) protège les individus contre les utilisations de leurs données personnelles en posant des règles que toute personne les exploitant se doit de respecter. En ce sens, l’exploitation d’images de vidéoprotection pour se constituer une preuve à faire valoir devant un juge contre un salarié constitue un traitement de données personnelles soumis à ces règles et admis à condition d’être licite.

La vidéosurveillance au cœur d’un licenciement contesté

Le 21 mai 2025, la chambre sociale de la Cour de cassation a rendu un arrêt concernant l’utilisation d’images de vidéosurveillance par un employeur pour justifier le licenciement d’un salarié.

En l’espèce, un agent de sécurité affecté au contrôle des bagages dans un aéroport avait été licencié pour faute, après avoir omis de contrôler un bagage. Pour établir cette faute, l’employeur avait produit comme « preuve » le témoignage des personnes habilitées à examiner les enregistrements issus du dispositif de vidéosurveillance installé dans l’aéroport afin d’assurer la sécurité des lieux.

Toutefois, le salarié a contesté son licenciement, soutenant que l’employeur ne l’avait jamais informé des finalités du dispositif de surveillance ni de son droit d’accès aux enregistrements le concernant.

Preuve de licenciement : la vidéosurveillance jugée conforme aux principes du RGPD

La Cour de cassation a rejeté les arguments du demandeur salarié pour les raisons suivantes :

La licéité de la collecte des images de vidéosurveillance 

Selon la Cour de cassation, les images collectées et utilisées pour justifier le licenciement respectent les dispositions du RGPD[1].

En effet, dans un parfait alignement avec les recommandations de la CNIL[2], la collecte des données personnelles du salarié a été faite pour satisfaire une finalité qui est bien déterminée et légitime : Assurer la sécurité des personnes et des biens dans l’enceinte de l’aéroport et non pas surveiller l’activité des salariés.

Aussi, ces données ont été traitées conformément aux finalités poursuivies dans la mesure où la faute reprochée au salarié consistait en un manquement aux règles de sécurité imposées par sa mission de contrôle des bagages.

De la même manière, le contrôle de son activité par la vidéosurveillance répond à l’objectif d’assurer la sécurité des biens et personnes dans l’aéroport.

Enfin, l’employeur justifiait d’une procédure qui garantit qu’un nombre limité de personnes pouvant visionner les images et une conservation des enregistrements pendant cinq jours uniquement, en adéquation avec le principe de minimisation du RGPD[3].

Transparence vis à vis de la personne concernée

Selon la Cour de cassation, le traitement d’images opéré par l’employeur est licite en ce que le salarié était informé[4] des finalités du dispositif et de son droit d’accès aux enregistrements le concernant pour les raisons suivantes :

THEMATIQUE DE L’ARGUMENT  DEVELOPPEMENT 
Déclaration préalable aux autorités compétentes 

Le système de vidéoprotection installé dans l’enceinte de l’aéroport a été déclaré à la CNIL en application des obligations applicables au moment de l’installation et a reçu une autorisation préfectorale.

Affichage conforme 

Puisqu’un aéroport est un lieu ouvert au public, un affichage (sous forme de pictogramme) représente une caméra, ce qui permet à toutes les personnes concernées d’être informées de la présence de ce dispositif, du droit d’accès afférent et des modalités de contact (qu’il s’agisse des salariés ou des visiteurs).

Procédure interne respectée 

Les représentants du personnel avaient été informés de l’installation d’un tel dispositif.

 

Une décision en accord avec le RGPD

La même chambre sociale de la Cour de cassation a jugé plusieurs cas de licenciement pour faute basés sur des preuves exploitant les données personnelles des employés. Il convient cependant de préciser que, sa jurisprudence s’harmonise souvent avec le RGPD.

Ainsi, la Cour de cassation confirme son orientation quant à l’admissibilité des preuves comportant des données personnelles, en réaffirmant des principes clairs. L’utilisation d’images de vidéosurveillance ou de toute autre preuve de cette nature est possible dès lors que le traitement des données respecte les exigences du RGPD.

À défaut, une telle preuve ne pourra être admise que si elle est indispensable à l’établissement des faits reprochés et que l’atteinte portée à la vie privée du salarié demeure proportionnée.

Cette décision illustre donc la volonté de la Cour de cassation d’encadrer strictement l’utilisation de la vidéosurveillance dans les relations de travail, en conciliant les impératifs de sécurité et la protection des droits fondamentaux des salariés.

Reste à savoir si, à l’avenir, la jurisprudence continuera d’affiner cet équilibre face aux nouveaux outils technologiques de contrôle de l’activité des salariés, dans un contexte où les enjeux de protection des données personnelles ne cessent de prendre de l’ampleur… A méditer.

***

Le cabinet HAAS Avocats, spécialisé depuis plus de vingt-cinq ans en droit des nouvelles technologies et de la propriété intellectuelle, est à votre disposition pour vous accompagner dans vos démarches de conformité et pour répondre à toutes vos interrogations sur la régulation des plateformes numériques. Pour nous contacter, cliquez ici.

[1] Articles 5 et 6 du RGPD

[2] CNIL, La vidéosurveillance – vidéoprotection au travail, 23 juillet 2018

[3] Article 5 du RGPD

[4] Articles 12 à 14 du RGPD

Haas Avocats

Auteur Haas Avocats

Suivez-nous sur Linkedin