Influenceurs et promotion d'alcool : quelles obligations juridiques ?

Influenceurs et promotion d'alcool : quelles obligations juridiques ?
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Par Haas Avocats

Les réseaux sociaux sont devenus le nouveau terrain de jeu du marketing des marques d'alcool. Les chiffres sont éloquents[1] :
  • 79 % des 15-32 ans voient chaque semaine sur les hashtags #RéseauxSociaux des publicités incitant à la consommation d’#alcool ;
  • 63 % des moins de 13 ans possèdent un compte sur ces mêmes plateformes, malgré l’interdiction légale pour les mineurs ;
  • Les entreprises d’alcool dépensent plus de 450 millions d’euros par an en marketing digital, ciblant en priorité les jeunes consommateurs.

Loin d'être de simples canaux de diffusion, ces plateformes façonnent les comportements de consommation et exposent massivement les jeunes – y compris les mineurs – à la promotion d'alcool.

L’essor fulgurant du marketing d’influence a bouleversé la communication des marques de vins et spiritueux. Pourtant, derrière l’apparente liberté des stories et des placements de produits se cache aujourd’hui un arsenal juridique sans précédent, croisant le fameux cadre de la loi Evin et la toute récente législation sur l’influence commerciale.

Tour d’horizon des règles, des risques et des perspectives pour un secteur sous le feu des projecteurs.

Les influenceurs face à la loi Evin : supports et contenus sous contraintes

La publicité pour les boissons alcooliques demeure strictement encadrée par la loi Evin, dont la portée s’étend désormais au numérique.

Seuls certains supports sont autorisés : presse écrite (hors jeunesse), radio sur tranches horaires limitées, affichage, communication sur les sites de vente spécialisés, envois de catalogues, inscriptions sur véhicules de livraison, événements traditionnels et, depuis 2009, les services de communication en ligne, à condition d’éviter tout caractère intrusif ou interstitiel (pop-up, plein écran) et d’exclure les sites destinés à la jeunesse ou au sport.

Le contenu autorisé reste tout aussi restrictif : seules les informations objectives sur le produit (degré, origine, dénomination, composition, fabricant, mode d’élaboration, modalités de vente et de consommation) sont admises. Toute association à la convivialité, à la réussite sociale ou à la performance est prohibée :

« La publicité pour les boissons alcooliques est limitée à l’indication: — du degré volumique d’alcool ; — de l’origine ; — de la dénomination ; — de la composition ; — du nom et de l’adresse du fabricant ; — des agents et des dépositaires ; — du mode d’élaboration ; — des modalités de vente et modes de consommation du produit. » (Article L3323-4 du Code de la santé publique).

La Cour de cassation a déjà eu l’occasion de confirmer cette rigueur, en sanctionnant une célèbre marque d’alcool dont le slogan incitait à vivre des moments de convivialité. (Cass. 1re civ., 3 juil. 2013, n° 12-22.633.).

Influenceurs : transparence et contractualisation, la nouvelle donne

La loi du 9 juin 2023 a instauré un cadre inédit pour l’influence commerciale. Depuis cette entrée en vigueur de ladite loi, toute personne qui utilise sa notoriété pour promouvoir des biens ou services, à titre onéreux ou en nature, doit respecter des obligations strictes de transparence et d’information :

  • La mention « Publicité » ou « Collaboration commerciale » doit figurer de manière claire, lisible et identifiable sur tout contenu diffusé, sous peine de sanctions pénales et administratives.
  • La non-divulgation de l’intention commerciale constitue désormais une pratique commerciale trompeuse, conformément à l’ordonnance du 6 novembre 2024 :
  • Au-delà d’un certain seuil de rémunération ou d’avantages en nature, un contrat écrit s’impose entre l’influenceur (ou son agent) et l’annonceur, précisant toutes les obligations, dont le respect du cadre Evin.

Responsabilité et sanctions : vigilance maximale

Le régime juridique renforce la responsabilité solidaire de l’annonceur, de l’influenceur et de l’agent : tous peuvent être tenus de réparer les dommages causés aux tiers – et notamment les consommateurs – par une campagne non conforme.

Les contrôles sont renforcés, notamment par la DGCCRF, qui mène des enquêtes pouvant aboutir à des sanctions pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 300 000 € d’amende pour une personne physique, ou jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires pour une personne morale fautive.

Influenceurs et promotion d’alcool : quelles évolutions légales et obligations en 2024 ?

Le secteur n’a pas fini de s’adapter : la loi du 22 avril 2024 habilite le Gouvernement à réécrire la loi « Influenceurs » pour la mettre en conformité avec le droit européen (DSA, directives sur les pratiques commerciales déloyales, etc.), notamment sur la définition de l’influenceur, les secteurs interdits, les mentions obligatoires...etc.

La promotion de l’alcool par les influenceurs sur les réseaux sociaux est aujourd’hui un exercice d’équilibriste juridique. Faites-vous accompagner par un cabinet d’avocats expérimenté et réactif, capable de vous guider dans la mise en conformité de vos stratégies d’influence et de communication !

3 recommandations pour les influenceurs

3 recommandations pour les annonceurs

Analysez votre audience : la proportion de mineurs parmi vos abonnés doit impérativement rester inférieure à 30 %.

Choisissez vos partenaires avec discernement : privilégiez les influenceurs capables de démontrer leur conformité à la loi Evin et à la loi Influence.

Affichez le message sanitaire obligatoire :

« L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. À consommer avec modération. »

Sécurisez vos contrats : prévoyez des clauses spécifiques relatives au contenu autorisé, aux mentions légales.

Évitez les associations interdites : pas de mise en scène de convivialité, de fête ou de performance sociale liée à la consommation.

Surveillez les publications : mettez en place un dispositif de contrôle régulier pour prévenir tout manquement.

 

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Si vous souhaitez bénéficier d’un accompagnement personnalisé : le cabinet HAAS Avocats est spécialisé depuis plus de vingt-cinq ans en droit des nouvelles technologies et de la propriété intellectuelle. Il accompagne de nombreux acteurs du numérique dans le cadre de leurs problématiques judiciaires et extrajudiciaires relatives au droit de la protection des données. Dans un monde incertain, choisissez de vous faire accompagner par un cabinet d’avocats fiables. Pour nous contacter, cliquez ici.

[1] Rapport – Association Addiction France - Promotion de l’alcool les réseaux sociaux, un nouveau far west - Septembre 2024

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Auteur Haas Avocats

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