Fichage ethnique : le PSG au cœur de la tourmente

Fichage ethnique : le PSG au cœur de la tourmente
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Par Gérard Haas et Axelle Poujol

Le Paris Saint Germain (PSG) ainsi que plusieurs de ses cadres ont été sanctionnés par la Ligue de Football Professionnel (LFP) dans l’affaire dite du fichage ethnique. Une enquête a également été ouverte par le parquet de Paris pour des soupçons de « discrimination fondée sur l’origine ou l’ethnie ou la nationalité ».


En 2016 et en 2018, une fuite massive de documents confidentiels et de données relatives au milieu du football, baptisée « Football Leaks »[1], a donné lieu à la révélation par plusieurs médias nationaux et européens d’une affaire concernant le club français de la capitale, le Paris Saint Germain : des fiches sur lesquelles la mention de la couleur de peau de jeunes joueurs serait mentionnée auraient été établies par des recruteurs du club entre 2013 et 2018. Considérant que ces fiches pouvaient conduire à des pratiques discriminatoires répréhensibles, plusieurs instances se sont saisies de l’affaire.

1. La procédure disciplinaire devant le CNE et la LFP

En novembre 2018, le Conseil National de l’Ethique (CNE) de la Fédération française de football (FFF) avait estimé que si « des fiches faisant mention d’une origine ethnique ont bien été utilisées », « les pratiques présumées discriminatoires ne sont pas établies ». Le CNE avait consécutivement saisi la commission de discipline de la LFP.

 

Celle-ci a rendu sa décision le 22 janvier 2019, dans laquelle elle condamne le club à une amende de 100 000 euros et plusieurs cadres à des amendes de 5000 et 10 000 euros avec sursis. La commission, suivant l’avis du CNE, a énoncé qu' « il n’y a aucun fait de discrimination qui a pu être relevé » et que « ces éléments [lui] sont apparus comme des maladresses individuelles et ressortent d’une négligence collective »[2].

2. Les éventuelles conséquences judiciaires et administratives du fichage ethnique

Si les instances disciplinaires ont rendu leur décision, l’affaire est cependant loin d’être terminée : le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire en novembre 2018 pour des soupçons de « discrimination fondée sur l’origine, l’ethnie ou la nationalité » après qu’une plainte contre X ait été déposée par la Ligue des droits de l’homme. En effet, le fichage ethnique, qui conduit à mentionner des données relatives à l’origine, l’ethnie ou la nationalité d’une personne, peut être qualifiée de discrimination et donner lieu à des sanctions.

Le sujet des discriminations dans le milieu sportif et professionnel n’est pas nouveau : dès 2013, le Ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, appuyé par le Défenseur des Droits, a publié un guide régulièrement actualisé intitulé « Prévenir et lutter contre les incivilités, les violences et les discriminations dans le sport »[3]. Composé de plusieurs fiches thématiques, ce guide dresse un état des lieux des comportements prohibés dans le milieu sportif, dont les discriminations.

 

De manière plus générale, est considérée comme une discrimination toute distinction opérée entre des personnes selon certains critères[4]  tels que :

  • L’origine
  • Le sexe
  • L’apparence physique
  • Le patronyme
  • L’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée

En matière pénale, la discrimination est punie de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende[5]. En outre, un comportement discriminatoire est également susceptible d’engager la responsabilité civile de son auteur à l’égard des victimes de discrimination et entraîner le paiement de dommages-intérêts.

 

Par ailleurs, en matière de protection des données, la loi informatique et libertés[6] et le règlement général européen sur la protection des données (RGPD)[7], entré en vigueur en mai 2018, interdisent par principe le traitement (cad la collecte, la conservation ou toute opération effectuée sur des données) de données jugées sensibles, parmi lesquelles les données relatives aux origines raciales ou ethniques ou encore les données génétiques et biométriques[8].

Si la CNIL décide de s’auto-saisir de cette affaire, le PSG, s’il est avéré qu’il a procédé à ce fichage ethnique sans le consentement des joueurs concernés et sans les en informer, encourt également des sanctions très importantes pour violation de cette règlementation, notamment des sanctions administratives pouvant aller jusqu’à 20 000 000 euros ou 4% de son chiffre d’affaires[9]. Affaire à suivre …

 

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[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Football_Leaks

[2] https://www.lemonde.fr/sport/article/2019/01/22/fichage-ethnique-au-psg-la-ligue-de-football-professionnel-inflige-une-amende-de-100-000-euros-au-club_5413020_3242.html

[3] https://defenseurdesdroits.fr/fr/outils/prevenir-et-lutter-contre-les-incivilites-les-violences-et-les-discriminations-dans-le-sport

[4] Article 225-1 du Code Pénal

[5] Article 225-2 du Code Pénal

[6] Loi n°78-17 du 6 février 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés

[7] Règlement UE 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données

[8] Article 8 de la loi informatique et libertés

[9] Article 83 du RGPD

[10] https://www.avocat-rgpd.com/

Gérard HAAS

Auteur Gérard HAAS

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