Droit et E-sport : les enjeux juridiques

Droit et E-sport : les enjeux juridiques
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Par Rachel Ruimy

Le e-sport (ou sport électronique) est une discipline permettant à des joueurs de s’affronter seul ou en équipe, par l’intermédiaire d’un support électronique, essentiellement le jeu vidéo.

Au lendemain de la finale du championnat du monde de League of Legends, de la Paris Games Week, du lancement de l’espace Flagship de la Team Vitality, l’e-sport est un phénomène de société de plus en plus populaire en France.

En effet, 1,3 million de français jouent régulièrement à des compétitions en ligne et 7,3 millions de français les regardent[1].

 

La loi pour une République numérique du 7 octobre 2016  a juridiquement encadré le régime du e-sport, désigné sous l’appellation de « compétition de jeux vidéo », comme confrontant à partir d’un jeu vidéo[2], au moins deux joueurs ou équipes de joueurs pour un score ou une victoire[3], ce qui n’inclut pas l’organisation d’une prise de paris.

1. L’organisation de compétitions de jeux vidéo

Sous réserve de certaines exceptions, le Code de la sécurité intérieure prohibe les jeux d’argent et de hasard[4]. A titre dérogatoire, est autorisée l’organisation des compétitions de jeux vidéo en la présence physique des participants dont la participation est ouverte au public, qui imposent des frais de participation ou tout autre sacrifice financier aux participants, qui fait naître l’espérance d’un gain sous la forme de récompenses monétaires ou de lots et qui comportent une part, même partielle, de hasard, dans l’attribution des gains[5].  

Attention : les frais de participation totaux perçus par l’organisateur auprès des joueurs ne doivent pas dépasser les coûts de l’organisation de la compétition[6].

Dans ce cas, l’organisateur devra réaliser une déclaration auprès du Ministère de l’intérieur chargé des courses et jeux, par le biais d’un téléservice dédié.

La déclaration doit être formulée dans l’année précédant la date du début de la compétition et au plus tard 30 jours avant.

Si des mineurs peuvent participer à la compétition, l’organisateur devra obtenir une autorisation du représentant légal de chaque joueur mineur[7], étant précisé que la participation à des compétitions offrant des récompenses monétaires est interdite à toute personne de moins de 12 ans[8].

L’organisation de compétitions d’e-sport intégralement en ligne au cours desquelles des récompenses peuvent être remportées est autorisée dès lors qu’il n’y a pas de participation financière[9].

Ces compétitions pourront avoir lieu avec des joueurs professionnels de jeux vidéo ayant un lien de subordination juridique avec une société ou une association.

2. Le statut des joueurs professionnels salariés 

Dans le cadre de la professionnalisation du e-sport, le régime du joueur professionnel salarié a également été juridiquement encadré.

Concrètement, après avoir obtenu un agrément auprès du Ministre chargé du numérique, une société ou une association pourra conclure un contrat de travail avec des joueurs professionnels salariés. Seuls des Contrats à Durée Déterminée (C.D.D.) pourront être conclus, pour une durée minimale d’un an et maximale de cinq ans[10]

En sus des dispositions classiques d’un contrat de travail[11], l’employeur devra s’engager à garantir une équité de traitement dans la préparation et les entrainements de l’ensemble des joueurs professionnels salariés.

 

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Organisateurs, promoteurs, sponsors, éditeurs ou diffuseurs de compétions de jeux vidéo ? Joueurs individuels ou en équipe ? Le Cabinet HAAS Avocats est à votre disposition pour vous accompagner dans votre activité e-sport. Contactez-nous ici pour toute information complémentaire.

 

 

 

[1] Chiffres France Esports et Médiamétrie du 29 octobre 2019

[2] Article 220 terdecies du Code général des impôts : II. « Est considéré comme un jeu vidéo tout logiciel de loisir mis à la disposition du public sur un support physique ou en ligne intégrant des éléments de création artistique et technologique, proposant à un ou plusieurs utilisateurs une série d'interactions s'appuyant sur une trame scénarisée ou des situations simulées et se traduisant sous forme d'images animées, sonorisées ou non ».

[3] Article L.321-8 du Code de la sécurité intérieure

[4]  Article L. 320-1 du Code de la sécurité intérieure (Ord. no 2019-1015 du 2 oct. 2019, art. 2 et 50, en vigueur le 1er janv. 2020)   Sous réserve des dispositions de l'article L. 320-6, les jeux d'argent et de hasard sont prohibés. Sont réputés [réputées] jeux d'argent et de hasard et interdits
[interdites] comme tels toutes opérations offertes au public, sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l'espérance d'un gain qui serait dû, même partiellement, au hasard et pour lesquelles un sacrifice financier est exigé de la part des participants. Cette interdiction recouvre les jeux dont le fonctionnement repose sur le savoir-faire des joueurs. Le sacrifice financier est établi dans les cas où une avance financière est exigée de la part des participants, même si un remboursement ultérieur est rendu possible par le règlement du jeu.

[5] Article L.321-9 du Code de la sécurité intérieure

[6] Décret n° 2017-871 du 9 mai 2017 relatif à l'organisation des compétitions de jeux vidéo

[7] Article L.321-10 du Code de la sécurité intérieure

[8] Article R. 321-44 du Code de la sécurité intérieure

[9] A l’exception des frais de connexion à internet et du coût d’achat du jeu vidéo.

[10] Sauf exception en cas de contrat conclu en cours de saison de compétition de jeux vidéo ou de remplacement d’un joueur absent ou suspendu dans les conditions précisées par l’article 102 de la loi pour une République numérique.  

[11] Qui sont rappelées par l’article 102 V. de la loi pour une République numérique à savoir : l’identité et l’adresse des parties, la date d’embauche et la durée pour laquelle il est conclu, la désignation de l’emploi occupé et les activités auxquelles participe le salarié, le montant de la rémunération et de ses différentes composantes y compris les primes et accessoires de salaire s’il en existe, les noms et adresses des caisses de retraite complémentaire et de prévoyance et de l’organisme assurant la couverture maladie complémentaire, l’intitulé des conventions ou accords collectifs applicables.  

Rachel Ruimy

Auteur Rachel Ruimy

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