Par Haas Avocats
Suite aux cas de maltraitance dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et à la forte médiatisation qui a récemment accompagné ces faits graves, la CNIL a été saisie de multiples demandes concernant l'installation de dispositifs de vidéosurveillance dans les chambres des résidents.C’est dans ce contexte que la Commission a rendu, le 29 février 2024 sa Délibération n° 2024-024 portant adoption d'une recommandation relative à la mise en place de dispositifs de vidéosurveillance au sein des chambres en Ehpad.
La vidéosurveillance est en effet au cœur de nombreuses réflexions actuelle au sein de la CNIL. C’est l’occasion ici de préciser les conditions d’un tel déploiement ainsi que les nombreuses exigences associées.
Des conditions restrictives de mise en œuvre
La CNIL a établi des conditions strictes que les Ehpad doivent respecter avant de mettre en place des dispositifs de vidéosurveillance. En principe, ces installations ne peuvent être envisagées que pour assurer la sécurité des résidents dans le cadre d’une enquête pour maltraitance, et ce, sous deux principales conditions cumulatives :
- Suspicion étayée de maltraitance : L’installation de caméras ne peut se justifier qu'en cas de suspicion fondée de mauvais traitements (comme des hématomes ou des changements comportementaux) malgré l’échec des dispositifs alternatifs de sécurité, tels que les boutons d’appel d’urgence sans fil ou les procédures de signalement.
- Échec des enquêtes préalables : La vidéosurveillance peut être envisagée après l’échec des procédures d’enquêtes internes qui n’auraient pas permis de confirmer ou d’infirmer les soupçons de maltraitance.
Des garanties préalables à respecter
Avant la mise en place de vidéosurveillance, les établissements doivent en outre garantir plusieurs mesures de conformité en s’assurant / documentant notamment les points suivants :
- Limitation dans le temps : L’activation des dispositifs doit être limitée dans le temps.
- Désactivation lors des visites : Les caméras doivent être désactivées lors des visites des proches, sauf si ces derniers sont soupçonnés de maltraitance.
- Cadre interne et consultation : Un cadre interne doit être établi quant aux conditions justifiant l’installation de vidéosurveillance, soumis à l'avis du Conseil de la vie sociale (CVS).
- Information et consentement : Les salariés doivent être informés de manière individuelle et collective. Le consentement des résidents doit être obtenu, ou celui de leur représentant légal, dans le respect des règles de protection des majeurs.
- Floutage des parties intimes : Les parties intimes des résidents doivent être floutées dans la mesure du possible lors des soins.
- Mention dans le règlement intérieur : La possibilité d’installer des caméras en cas de suspicions fortes doit figurer dans le règlement intérieur.
- En cas de demande émanant des familles: l'installation doit être réalisée en concertation avec l’établissement, tenant compte des procédures d’enquêtes et de l’information du personnel.
Interdiction pour l'amélioration du service
Il est à noter que la CNIL interdit par principe l’installation de caméras pour des raisons d'amélioration du service ou de confort des résidents, même avec leur consentement, en raison des atteintes à la dignité que cela pourrait engendrer.
D’autres dispositifs moins intrusifs, comme les capteurs de présence ou les bracelets détecteurs de chute, doivent être privilégiés pour assurer la sécurité des résidents.
Analyse d'impact relative à la protection des données (AIPD)
En application de l’article 35 du RGPD, les risques élevés pour les droits et libertés des personnes concernées lors de l’installation de tels dispositifs exigent la réalisation d’une AIPD.
Cette AIPD devra être effectuée avant la mise en place de la vidéosurveillance.
Elle visera notamment à assurer et documenter un encadrement strict de l'utilisation de la vidéosurveillance dans les Ehpad pour répondre aux préoccupations de maltraitance, tout en préservant la dignité et la vie privée des résidents.
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Le cabinet HAAS Avocats est spécialisé depuis plus de vingt-cinq ans en droit des nouvelles technologies et de la propriété intellectuelle. Le département e-santé du Cabinet accompagne les acteurs du secteur médical et médico-social dans la mise en conformité de leur activité au RGPD. Pour nous contacter, cliquez ici.