Par Gérard Haas et Eve Renaud-Chouraqui
Google est dans le viseur de plusieurs autorités de la concurrence au sein de l’Union Européenne.
Après des enquêtes menées en France concernant le marché de la publicité en ligne ou encore les droits voisins, c’est au tour des autorités de la concurrence italienne et allemande de mener l’assaut.
1. Les enquêtes italiennes et la récente condamnation de Google à une amende de 102 millions d’euros
L’Italie ne se cache pas de vouloir mener une vraie offensive à l’encontre des GAFA et de leur toute puissance.
Après avoir obtenu, en 2017, le versement par Google de la somme de 306 millions d’euros au fisc italien, c’est désormais auprès du gendarme italien de la concurrence que Google devra s’alléger de la somme de 102 millions d’euros.
L’autorité italienne reproche en effet à Google d’avoir refusé, pendant près de deux ans, d’accepter sur sa plateforme Google Play une application tierce permettant de trouver des bornes de recharge pour les véhicules électriques.
L’application, dénommée Juice Pass, est développée par un géant national italien, le fournisseur d’énergie ENEL, et permet à tout véhicule électrique de se connecter et d’obtenir divers services allant de la recharge de véhicules, à la recherche de bornes de recharge et à la réservation de bornes.
Les raisons de ce refus ? Elles ne peuvent qu’être supposées...
L’application entrerait en concurrence avec Google Maps (même si celle-ci ne permet pas, à l’heure actuelle, de localiser les bornes de recharge des véhicules), mais surtout elle priverait Google de la possibilité de collecter les données sur ses utilisateurs et d’améliorer, à terme, sa propre application.
Les enjeux pour Google sont d’autant plus importants que 75% des italiens sont équipés d’un smartphone Android.
L’autorité italienne considère que l’exclusion de l’application « pourrait compromettre définitivement la possibilité pour ENEL X ITALIA de construire une base solide d’utilisateurs à un moment où on enregistre une croissance significative des ventes de véhicules électriques ».
En plus de l’amende prononcée, l’autorité italienne a également imposé à Google de mettre à la disposition d’ENEL X ITALIA et d’autres développeurs d’applications « les instruments pour la programmation d’applications fonctionnant sur Android Auto » et ce, sous le contrôle d’un expert indépendant ».
Mais l’autorité italienne ne compte pas s’arrêter là.
Une seconde enquête (dont l’issue est programmée pour la fin de l’année 2021) a été ouverte concernant la position dominante de Google sur le marché de la publicité en ligne.
Dans un communiqué, l’autorité italienne a fait part de sa crainte que Google n’utilise de manière discriminatoire l’énorme quantité de données collectées par ses applications pour empêcher ses concurrents de pouvoir rivaliser efficacement.
Et finalement c’est bien là tout le cœur du problème dans les problématiques de concurrence reprochées aux GAFA : la collecte et l’utilisation massive de données permettant de restreindre toute concurrence tierce.
C’est justement sur les données que l’autorité allemande a également ouvert deux nouvelles enquêtes contre Google.
2. L'Allemagne ouvre deux enquêtes contre Google
Les deux enquêtes allemandes visent :
- le marché de données et la domination de Google sur ce marché ;
- les termes et conditions autorisant Google à traiter des données collectées.
Selon l’autorité de la concurrence allemande, Google est en capacité, via ses diverses applications (Chrome, Google Maps, Youtube, Android…), d’emmagasiner un volume considérable de données sur ses utilisateurs chaque jour et partant, de faciliter et favoriser son activité publicitaire.
Concernant l’Allemagne, il est important de préciser que depuis le début de l’année 2021, l’autorité allemande dispose de pouvoirs renforcés lui permettant d’envisager rapidement une sanction.
La nouvelle réglementation mise en place, critiquée par certains et applaudie par d’autres, lui permet de juger de manière particulièrement rapide des pratiques relevées, afin de s’assurer que la sanction prononcée empêche réellement les géants du net dans leurs pratiques.
Ainsi, l’autorité de la concurrence allemande n’a plus besoin de prouver un abus de position dominante (preuve nécessitant des investigations longues et ralenties par la nature même des objets à auditer : données massives, algorithmes opaques, etc..). Elle doit se contenter de justifier que les entreprises revêtent « une importance primordiale sur le marché » en raison de leurs moyens, notion éminemment plus simple à qualifier.
Par ailleurs, la loi allemande a créé une voie judiciaire spécifique aux géants du net : désormais le tribunal fédéral sera la première et dernière instance pour pouvoir juger des affaires concernant les plateformes numériques.
Nul doute que cet arsenal sera particulièrement efficace dans la lutte que les Etats et l’Europe ont décidé de mener, conjointement ou individuellement, contre les GAFA afin de préserver leur souveraineté numérique et leur économie digitale, car tel est le réel enjeu de ces procédures multiples…
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