Par Haas Avocats
Le Règlement n°2025/327 sur l’Espace Européen des Données de Santé (EEDS), publié le 5 mars 2025, fixe un objectif ambitieux : garantir l’accès au dossier médical électronique de 100 % des citoyens européens d’ici 2030. Ce cadre harmonisé vise à faciliter la circulation des données de santé au sein de l’UE, en supprimant les barrières entre les systèmes nationaux.
Jusqu’à présent, la mobilité des patients était entravée par la fragmentation des infrastructures de santé. L’EEDS apporte une solution en assurant à chaque citoyen un accès simplifié, sécurisé et interopérable à ses données médicales, et en facilitant leur partage avec les professionnels de son choix. Cette réforme marque une avancée majeure pour la continuité des soins et l’amélioration de la prise en charge médicale en Europe.
Un accès facilité aux données de santé des citoyens européens
Désormais, chaque citoyen européen pourra accéder électroniquement et gratuitement à ses données médicales via des plateformes nationales dédiées (portails web ou applications mobiles). Ces services permettront la consultation de comptes rendus, résultats d’examens, ordonnances électroniques, imagerie médicale et hospitalisations dans un format interopérable commun à l’UE.
Les professionnels de santé devront accepter ces formats standards pour garantir la continuité des soins. Un médecin ne pourra donc plus refuser un document conforme au format européen sous prétexte d’incompatibilité technique.
L’EEDS renforce également les droits des patients :
- Droit d’accès et de rectification des informations médicales.
- Droit de portabilité, permettant à un patient en déplacement de partager son dossier avec un professionnel de santé étranger.
- Droit de gestion des accès, avec la possibilité d’autoriser des proches ou des tuteurs à consulter et gérer ses données via un système de procuration électronique.
Pour garantir l’inclusion numérique, des services d’assistance seront déployés afin d’accompagner les personnes rencontrant des difficultés dans l’usage de ces outils.
Le rôle clé des professionnels de santé
En matière de partage des données primaires, les professionnels et les établissements de santé occupent une place centrale. Le règlement leur impose plusieurs obligations pour lever les freins au partage d’informations médicales :
- Numérisation systématique : Les prestataires de soins (médecins, hôpitaux, laboratoires, pharmaciens, etc.) doivent alimenter les dossiers de santé en format électronique de manière systématique pour les catégories de données prioritaires définies au niveau européen
- Interopérabilité obligatoire : Lorsqu’un document médical est transmis sous le format d’échange européen, il doit être accepté et utilisé, sans possibilité de refus pour des raisons techniques.
- Accès proportionné : Les soignants doivent se limiter aux informations strictement nécessaires et justifiées pour le soin envisagé, conformément au principe de minimisation.
- Droit d’opposition partiel : Le patient peut restreindre l’accès de certains professionnels à des données spécifiques de son dossier, tout en conservant la possibilité de revenir sur son choix.
- Interaction avec le patient : Le patient dispose d’une copie électronique de ses données et peut y contribuer (annotations, suivi). Les professionnels sont informés de ces ajouts et doivent traiter les demandes de correction via la plateforme dédiée.
Ces nouvelles règles instaurent un cadre juridique harmonisé à l’échelle européenne pour garantir un échange fluide et sécurisé des données médicales.
MyHealth@EU : L’infrastructure européenne d’échange des données de santé
La plateforme MyHealth@EU (MaSanté@UE) devient le socle technique du partage transfrontalier des données de santé. Chaque pays devra connecter ses hôpitaux, médecins et pharmacies via un point de contact national, garantissant des échanges conformes aux standards européens.
- Fonctionnalités clés :
✔ Accès sécurisé aux e-prescriptions et résumés médicaux entre États membres.
✔ Transmission des dossiers patients standardisés en quelques clics, avec le consentement du patient.
✔ Interopérabilité totale, indépendamment de la langue ou du logiciel utilisé.
✔ À terme, intégration possible des certificats de vaccination et du suivi des maladies infectieuses.
- Sécurité et confidentialité : MyHealth@EU ne stocke pas les données mais les transmet sous forme chiffrée, avec une authentification interopérable et une journalisation rigoureuse des accès pour assurer transparence et traçabilité.
L’extension de MyHealth@EU à toute l’UE devient obligatoire, avec une période de transition et un accompagnement technique pour aider les États membres à s’adapter.
Interopérabilité et conformité : un défi pour les éditeurs de DME
L’EEDS impose aux éditeurs de dossiers médicaux électroniques (DME) des exigences harmonisées pour assurer une interopérabilité totale en Europe. Tous les DME, y compris ceux développés en interne par les établissements de santé, devront intégrer deux modules obligatoires :
- Un composant d’interopérabilité garantissant la compatibilité avec le format européen.
- Un module de journalisation pour tracer les accès et partages de données.
Une certification européenne unique remplacera les normes nationales fragmentées. Les logiciels de santé devront être soumis à des tests de conformité, condition indispensable pour être commercialisés ou utilisés dans l’UE.
Impact pour les éditeurs :
- Adaptation des logiciels aux formats européens (FHIR, CDA).
- Intégration de l’identification européenne des patients et professionnels.
- Mise en place du module de traçabilité des accès.
Sanctions en cas de non-conformité : tout DME qui n’intègre pas ces exigences (ex. absence d’export des données dans le format européen) pourra faire l’objet de mesures correctives ou de sanctions.
Les applications de bien-être (ex. apps mobiles de suivi sportif ou nutritionnel) seront également concernées : celles interagissant avec des DME devront obtenir un label de conformité garantissant leur compatibilité avec les standards EEDS.
Vers un marché unique du numérique en santé
Avec l’EEDS, l’Europe franchit une nouvelle étape vers un marché unique du numérique en santé. L’uniformisation des règles facilitera l’innovation et l’accès au marché européen pour les éditeurs conformes, tout en garantissant aux citoyens un droit effectif à la portabilité et à la continuité des soins à l’échelle de l’UE.
L’EEDS constitue une avancée décisive dans la transformation numérique de la santé en Europe, garantissant aux patients un meilleur accès à leurs données et aux professionnels une prise en charge plus fluide. Toutefois, sa mise en œuvre impose aux acteurs du secteur une adaptation majeure pour relever les défis de l’interopérabilité et de la sécurité des données.
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Le cabinet HAAS Avocats est spécialisé depuis plus de vingt-cinq ans en droit des nouvelles technologies et de la propriété intellectuelle. Il accompagne les acteurs du numérique dans leur conformité à la réglementation applicable en matière de e-commerce ainsi que dans le cadre de précontentieux et contentieux. Dans un monde incertain, choisissez de vous faire accompagner par un cabinet d’avocats fiables. Pour nous contacter, cliquez ici.