Cookies : la CNIL analyse le modèle « consentir ou payer »

Cookies : la CNIL analyse le modèle « consentir ou payer »
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Par Haas Avocats

Une grande partie des services en ligne que nous utilisons quotidiennement se présente comme « gratuite ». En réalité, cette gratuité apparente est souvent synonyme de contrepartie : l’exploitation des données personnelles des utilisateurs à des fins publicitaires.

La CNIL a récemment publié les résultats d’un sondage visant à évaluer la perception des Français face à ces modèles économiques et leur disposition éventuelle à payer pour des services en ligne sans publicité ciblée.

Les résultats de cette enquête menée auprès d’un échantillon de près de 2000 personnes permettent un éclairage sur les enjeux de consentement de modèles « gratuits » financés par les données et d’alternatives payantes respectueuses de la vie privée.

Le modèle « consentir ou payer » expliqué par la CNIL

Pour la CNIL, le modèle « consentir ou payer » n’est pas interdit, mais il doit répondre à plusieurs conditions :

  • L’utilisateur doit disposer d’un vrai choix : accéder au contenu d’une autre manière ou à un tarif raisonnable.
  • Le prix demandé ne doit pas dissuader excessivement l’utilisateur, sinon le consentement n’est plus libre.
  • Les éditeurs doivent informer clairement sur ce que chaque option implique : quelles données sont collectées, et dans quel but.

Ce modèle reste donc possible, mais sous réserve d’un équilibre entre la liberté de l’utilisateur et la viabilité économique du service.

Consentement et cookies : le choix de l’utilisateur est-il vraiment libre ?

Cette évolution soulève cependant une question juridique majeure : le consentement est-il vraiment libre si refuser les cookies implique de payer ? Même une somme dérisoire…

Le RGPD exige, en effet, que le consentement soit donné sans contrainte ni déséquilibre. On pourrait alors imaginer que l’alternative payante est trop couteuse, le choix de l’utilisateur devenant presque illusoire.

Dès lors, se pose la question du monnayage frontal de la vie privée : Si payer devient la seule manière d’éviter le traçage, la protection des données risque de devenir un privilège réservé à ceux qui en ont les moyens.

Pourtant, le sondage présenté par la CNIL montre que les abonnements payants se sont installés dans les usages.

  • 56% des Français paient déjà un service de vidéo à la demande pour environ 20 euros par mois.
  • Pour la musique, ce taux tombe à 27% et à 18% pour les jeux vidéo.

Pour d’autres services tels que les réseaux sociaux, la presse, la santé, l’IA générative, moins de 10% des utilisateurs paient aujourd’hui. Mais entre 24% et 33% déclarent qu’ils seraient prêts à le faire pour accéder à une version sans publicité.

Les Français se disent disposés à payer en moyenne 5,5 euros à 9 euros par mois selon le service. Autrement dit, une partie du public valorise la protection de ses données au point d’y consacrer un budget.

Ce sont surtout les 18-24 ans et les abonnés déjà payants qui se montrent les plus disposés à payer davantage pour une expérience sans ciblage publicitaire.

Mais, au final, ce qui est monnayé ici c’est le service et non la vie privée en elle-même. La question de la publicité ciblée reste accessoire ou secondaire dans l’utilisation de plateformes comme netflix, spotify, etc.

De la vie privée à l’avantage concurrentiel : un changement de paradigme

La protection de la vie privée devient tout de même un argument commercial à part entière. Pour les entreprises, ignorer cette attente peut fragiliser la confiance du public. A l’inverse, une approche claire et respectueuse des données peut devenir un avantage concurrentiel.

L’étude de la CNIL ouvre plusieurs pistes :

  • Accompagner les entreprises dans la création de modèles conformes : définir des conditions claires, ajuster les tarifs, et garantir un consentement réellement libre.
  • Réconcilier rentabilité et droits fondamentaux : trouver le juste équilibre entre exploitation des données et respect RGPD.
  • Valoriser la conformité comme facteur de confiance : dans un contexte où les utilisateurs se montrent plus exigeants, la transparence devient un atout stratégique.

L’étude de la CNIL met en lumière un tournant majeur dans la relation entre les utilisateurs, les services en ligne et la valeur accordée à la vie privée. Si le modèle « consentir ou payer » soulève d’importants enjeux juridiques et éthiques, il témoigne aussi d’une prise de conscience croissante : les données personnelles ont une véritable valeur économique et sociale. Les Français apparaissent désormais plus attentifs aux conditions d’utilisation de leurs informations et certains sont prêts à payer pour davantage de transparence et de contrôle. Toutefois, la liberté du consentement ne saurait être réelle que si l’alternative payante reste accessible et équitable.

Dans ce contexte, la protection des données n’est plus seulement une obligation réglementaire, mais un levier de confiance et de différenciation pour les entreprises. A voir qui se démarquera…

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