Affaire Booking : quelle réglementation pour les meublés de tourisme ?

Affaire Booking : quelle réglementation pour les meublés de tourisme ?
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Par Frédéric Picard et Irène Corne

A propos de : TJ Paris, 18 octobre 2021, n° 21/52480

Après la condamnation de Airbnb en juillet dernier, c’est au tour de Booking.com de verser 1,2 millions à la Ville de Paris pour non-respect des règles applicables en matière de meublés de tourisme.

C’est l’occasion de revenir sur les obligations qui incombent aux plateformes numériques jouant le rôle d’intermédiaires de location.

Quelle règlementation en matière de meublés de tourisme ?

L’article L. 324-1-1 du code du tourisme prévoit que, en principe, il est possible de louer librement sa résidence principale dans une limite de 120 jours par an. Toutefois, certaines situations vont nécessiter des démarches particulières :

  • Dans les communes de plus de 200 000 habitants, ainsi que dans la petite couronne parisienne, le loueur doit déclarer son logement auprès de la mairie afin d’obtenir un numéro d’enregistrement.

Lorsque le logement loué dans une limite de 120 jours par an est une résidence secondaire :

  • Dans les communes de plus de 200 000 habitants, ainsi que dans la petite couronne, le loueur doit faire une demande d’autorisation préalable de changement d’usage du bien auprès de la mairie (il s’agit dans ce cas de location de tourisme et non de location d’habitation) et doit faire une déclaration en vue d’obtenir un numéro d’enregistrement.
  • Dans les autres communes, il suffit de déclarer son logement auprès de la mairie en vue d’obtenir un numéro d’enregistrement. Attention : les communes de plus de 50 000 habitants peuvent également mettre en place un régime d’autorisation préalable tel que mentionné précédemment, auquel cas il conviendra d’effectuer une demande en ce sens.

Quelles obligations pour les plateformes en matière de meublés de tourisme ?

Conformément à l’article L. 324-2-1 du code du tourisme, plusieurs obligations incombent aux plateformes qui se livrent ou prêtent leur concours à la mise en location de meublés de tourisme :

  • Obligation d’information envers le loueur: les plateformes qui se livrent ou prêtent leur concours à la mise en location de meublés de tourisme doivent informer le loueur des obligations de déclaration ou d’autorisation préalables.
  • Obligation de transmettre certaines informations à la mairie: à la demande de la mairie et dans un délai d’un mois, la plateforme doit lui transmettre le nombre de jours au cours desquels le meublé de tourisme a fait l’objet d’une location. Ce faisant, la plateforme doit rappeler : le nom du loueur, l’adresse du meublé, son numéro de déclaration ainsi que le fait que ce meublé constitue ou non la résidence principale du loueur.
  • Obligation de retirer certaines annonces: la plateforme doit s’assurer qu’un meublé déclaré comme résidence principale du loueur n’est pas loué plus de 120 jours par an. Si c’est le cas, elle doit retirer les annonces en question.

Le non-respect de ces obligations est passible d’une amende civile de 12 500 € maximum par meublé pour les loueurs et 50 000 € maximum par annonce pour les plateformes.

Hébergeur vs. Editeur : quelle responsabilité de Booking.com face à la règlementation des meublés de tourisme ?

Conformément à la réglementation exposée ci-haut, la ville de Paris avait demandé à Booking.com de lui transmettre les informations relatives au nombre de jours au cours desquels des meublés de tourisme faisaient l’objet d’une location. Ces informations, qui devaient être transmises à la mairie sous un mois, n’ont été transmises que quelques mois après la demande et, selon la mairie, de manière incomplète. La ville de Paris a donc assigné la plateforme devant le président du tribunal judiciaire de Paris, qui a statué selon la procédure accélérée au fond.

Pour condamner la plateforme, le juge a considéré que Booking.com n’est pas qu’un simple hébergeur mais un véritable éditeur de contenu dans la mesure où elle « joue un rôle actif de nature à lui confier une connaissance ou un contrôle des données stockées »[1]. Dès lors, puisque la plateforme exerce un certain contrôle sur les données du site, cela permet de présumer la détention de certaines informations telles que le nombre de jours loués, le nom et l’adresse du loueur, son numéro de déclaration etc. Ainsi, la plateforme ayant transmis les informations tardivement, qui plus est de façon insuffisante, elle a violé les dispositions prévues par le code du tourisme.

Les plateformes numériques de réservation de meublés de tourisme dans le viseur de la ville de Paris

Ce n’est pas la première condamnation en ce sens, ni peut-être la dernière. En effet, par un jugement rendu le 1er juillet 2021, Airbnb a été condamnée à plus de 8 millions d’euros d’amende civile pour ne pas avoir respecté la réglementation en matière de meublés de tourisme. Plus précisément et comme évoqué ci-haut, les annonces en ligne doivent être publiées avec le numéro de déclaration exigé par l’article L324-2-1 du code du tourisme. Et, conformément à ce même article, les plateformes numériques doivent informer le loueur des obligations de déclaration ou d’autorisation préalable sous peine de sanction pécuniaire.

En outre, dans son communiqué de presse suite à la décision contre Booking.com, la ville de Paris indique que d’autres procédures similaires sont en cours, notamment à l’encontre de TripAdvisor et HomeAway. Huit audiences sont attendues dans les temps à venir. Il est donc primordial pour les plateformes de s’assurer de leur conformité aux règles relatives aux meublés de tourisme.

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[1] Notamment Booking.com dispose d’un programme premium « Genius » qui permet aux utilisateurs d’améliorer leur classement contre le paiement d’une commission et met également en place un système de notation qu’elle gère elle-même. Cf. TJ Paris, 18 octobre 2021, n° 21/52480 p. 16.

Frédéric PICARD

Auteur Frédéric PICARD

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